Plusieurs dizaines de milliers de citoyens, dont certains venus en famille, sont sortis hier dans les rues de Béjaïa pour le 19e vendredi de mobilisation populaire depuis le déclenchement de la révolution pacifique du 22 février. Brandissant l'emblème national aux côtés du drapeau amazigh, qui flottaient tout au long de la marche d'hier, les manifestants se sont d'abord rassemblés, comme à l'accoutumée, sur l'esplanade de la maison de la culture Taos-Amrouche. Vers 13h30, les alentours du carrefour d'Aâmriw étaient déjà bondés de monde. Quelques minutes plus tard, les premiers carrés de manifestants se mettent en place à hauteur de la trémie d'Aâmriw, avant que le coup d'envoi de la marche ne soit donné sous les cris de "Mazalagh d'Imazighen" (Nous resterons des Amazighs), "Pouvoir assassin", "Ulac smah ulac" (Pas de pardon), "Système dégage !"… Autant de slogans habituels qui sont repris en chœur et à tue-tête par une immense foule, bravant cette chaleur caniculaire qui s'est abattue en ce vendredi 28 juin sur la ville des Hammadites. Bien que les manifestants aient réitéré la principale revendication du mouvement populaire né le 22 février, à savoir "le départ définitif de tous les symboles du système", il n'en demeure pas moins que le chef d'état-major de l'armée, Ahmed Gaïd Salah, est le responsable qui a essuyé le plus de critiques de la part des Béjaouis. "Gaïd Salah dégage !", "Khawa khawa, El-Gaïd maâ el-Khaouana", "Ni Etat policier ni Etat militaire", "Pour un Etat civil et de droit"…, ont scandé, hier encore, les manifestants à Béjaïa. Les Béjaouis ont déployé, hier, un nombre plus important que jamais d'étendards berbères. "Nous sommes un seul peuple. L'Algérie est notre patrie, l'amazighité est notre identité. Ne cherchez pas à changer de sujet. Notre priorité est le départ du système dont vous faites partie, M. Gaïd Salah !", lance un ancien sexagénaire portant un drapeau berbère, au milieu d'un carré de manifestants. À noter que les marcheurs ont sillonné plusieurs artères de la ville de Yemma Gouraya, en empruntant le boulevard de la Révolution depuis le carrefour d'Aâmriw, puis la rue de la Liberté, le boulevard Amirouche, avant de descendre vers le port et la gare ferroviaire, pour regagner enfin le quartier d'El-Khemis et la cité Tobbal. Un itinéraire de pas moins de trois kilomètres, au cours duquel les manifestants ont réitéré les principales revendications du hirak, notamment "le rejet de toute consultation ou de tout pourparler avec les dignitaires du régime", "le rejet de toute élection organisée par le même pouvoir", "la mise en place d'une instance indépendante devant gérer la période de transition qui permettra l'avènement de la nouvelle République".