C'est une première en Algérie. Le procureur de la République près le tribunal de Sidi M'hamed (Alger) a instruit, hier, les services de la police judiciaire, relevant de la sûreté de la wilaya d'Alger, d'ouvrir une enquête préliminaire sur les brutalités policières commises sur des manifestants lors du 20e vendredi de mobilisation populaire contre le système et ses symboles. "En application des dispositions de l'article 11, alinéa 3, du code de procédure pénale, modifié et complété, et après avoir visionné une vidéo relayée sur les réseaux sociaux montrant des éléments de la police en train de frapper un individu en civil, des instructions ont été adressées, le 6 juillet 2019 à 18h30, aux services de la police judiciaire territorialement compétents à l'effet de nous fournir des informations détaillées sur ces faits", indique un communiqué rendu public par le procureur de la République près le tribunal de Sidi M'hamed. Selon la même source, un rapport préliminaire est parvenu en date du 7 juillet dernier, "suite auquel les services de la police judiciaire relevant de la sûreté de la wilaya d'Alger ont été instruits de diligenter une enquête préliminaire approfondie sur les faits montrés par la vidéo en s'assurant de leur véracité par le recours à des techniciens et d'identifier les auteurs après confirmation des conditions et des circonstances de l'incident". Dimanche dernier, le patron de la Sûreté nationale, Abdelkader Kara Bouhadba, avait instruit, dimanche, l'Inspection générale de la Sûreté nationale (IGS) d'ouvrir une enquête quant à une vidéo montrant des policiers passer à tabac des manifestants, dont un jeune isolé qui a violement été frappé alors qu'il était à terre. Le directeur de la Sûreté nationale (DGSN) a insisté sur l'urgence d'enquêter sur les faits et de situer les responsabilités afin que toutes les mesures prévues par la loi soient prises. Et si l'enquête du DGSN relève d'une pure procédure interne, sachant que l'IGS s'occupe de la recherche des irrégularités et des délits commis par les policiers au profit de la commission de discipline qui décide de l'issue à donner à quiconque est incriminé, il est clair que celle diligentée par le procureur de la République revêt un caractère strictement pénal et les auteurs de ces actes de violence encourent des mesures allant de la radiation du corps de la Sûreté nationale jusqu'à l'emprisonnement. Ainsi, la justice compte sur l'exploitation maximale des vidéos filmées depuis des balcons d'Alger montrant l'acharnement des policiers sur des manifestants. D'autant que, comme le montrent ces vidéos, les forces de l'ordre ont empêché les manifestants d'intervenir pour secourir les blessés. Selon les mêmes images, diffusées sur les réseaux sociaux, les personnes blessées ont dû leur salut à l'intervention des secouristes, des jeunes vêtus de gilets orange, présents dans toutes les marches à Alger. Pour rappel, ces scènes de violences se sont déroulées alors que les Algériens célébraient le 57e anniversaire de l'Indépendance de l'Algérie.