Le dernier discours du chef d'état-major n'a ni amoindri l'enthousiasme des Oranais ni altéré leur détermination à poursuivre la lutte. Au cours de la marche d'hier, les manifestants, une nouvelle fois sortis en masse malgré la chaleur et l'humidité, ont même osé la provocation en répétant "Dawla madania, machi âaskaria" (Etat civil et non militaire), slogan contre lequel avait averti l'homme fort de l'armée, qui y voit la patte manipulatrice des ennemis de l'Algérie. En réponse aux avertissements du chef d'état-major, certains s'étaient symboliquement attaché les mains et scellé les lèvres avec une bande adhésive, alors que d'autres brandissaient des pancartes appelant à la libération de Bouregâa et des détenus d'opinion. Pour les manifestants, ce serait plutôt Gaïd Salah l'ennemi du peuple, lui qui s'entête à ignorer les revendications populaires et à vouloir imposer sa feuille de route. "Ce n'est pas à lui de décider mais au peuple. Et le peuple refuse les élections et rejette l'initiative du Forum national pour le dialogue", ont répété les manifestants, en soulignant que leur objectif reste le même : le démantèlement du système et le départ de toutes ses figures. Parmi ces symboles, Ahmed Gaïd Salah, désormais en tête des personnages les plus vilipendés par les marcheurs qui ont, à leur tour, durci le ton en lançant des "Lyed felyed, ennahou el issaba ouenzidou Gaïd", en lui rappelant qu'il est "au service du peuple", qu'il doit "cesser ses manœuvres" et se rendre aux "choix souverains du peuple". Ces slogans, les manifestants les ont répétés encore et encore depuis le départ de la marche place du 1er-Novembre-1954 jusqu'au siège de la wilaya. En cours de route, ils ont observé un arrêt devant le siège de la mouhafadha d'Oran, où ils ont scandé "Klitou lebled ya serrakin" et réclamé le "dégagisme" du FLN,. Les manifestants n'ont pas manqué de rappeler la fin de mandat d'Abdelkader Bensalah par un "Ça y est, c'est bon, chaâb président !", exigeant dans le même sillage l'application des articles 7 et 8 de la Constitution qui stipulent que le peuple est la source du pouvoir et que la souveraineté nationale lui appartient exclusivement. Après le rassemblement devant le siège de la wilaya, les milliers de manifestants se sont rendus place Zabana pour un deuxième rassemblement, avant de reprendre le chemin de la place du 1er-Novembre, par le front de mer, avant de se disperser dans le calme.