Comme il fallait s'y attendre, le discours que le chef d'état-major de l'ANP, Ahmed Gaïd Salah, a prononcé le 30 juillet n'est pas passé inaperçu chez de nombreux Oranais. Ceux qui sont sortis pour la marche du 24e vendredi l'ont fait savoir avec fracas. "Gaïd Salah, dégage", "Gaïd Salah, serviteur des Emirats", "Gaïd Salah, n'oublie pas que tu es au service du peuple", "Main dans la main, nous chasserons la bande et Gaïd", "Gaïd Salah, vote tout seul", sont quelques-uns des slogans que les marcheurs ont adressés à celui qui détient le véritable pouvoir. "Il n'est pas dans ses attributions d'interférer dans la vie politique. Sa mission est de sécuriser les manifestations, de surveiller les frontières… Mais depuis l'activation de l'article 102, il s'est mis dans la peau d'un chef d'Etat et ce n'est pas normal", s'est emporté un manifestant en appelant Ahmed Gaïd Salah "à regagner la caserne". Très remontés contre le chef d'état-major, beaucoup ont brandi la menace de la désobéissance civile. "Nous attendions des signes d'apaisement, mais ceux-ci ne viennent pas. Malgré le caractère pacifique des manifestations et la patience des Algériens, nous sentons que le pouvoir, par la voix du général, tourne de plus en plus le dos à nos revendications. Il est peut-être temps de hausser le ton", a expliqué l'un de ceux qui ont appelé à la désobéissance civile pendant que des jeunes scandaient : "Dawla madania, machi âaskaria". Les manifestants ont également rappelé la raison première pour laquelle ils sont sortis un certain vendredi 22 février 2019 : le départ de l'ensemble du pouvoir. "Il reste encore beaucoup de figures du pouvoir en place, c'est pour cela que nous refusons le dialogue et les élections. Il faut que les principaux symboles du pouvoir dégagent, c'est notre condition pour entamer le dialogue", a encore indiqué une manifestante en rassurant sur la disponibilité des Oranais à entamer le dialogue, "mais ni avec Bensalah, ni Bedoui, ni Gaïd Salah, ni avec les partis qui continuent de soutenir les puissants". Les manifestants ont, par ailleurs, réclamé la libération de Lakhdar Bouregâa et celle de tous les détenus politiques, l'arrêt de la répression et le retour de la souveraineté au peuple à travers l'application des articles 7 et 8 de la Constitution. "Nos revendications sont claires et simples : départ du pouvoir, retour de la souveraineté au peuple et droit de prendre notre destinée en main", a énuméré un jeune, résumant l'essence même de la "révolution du sourire". Parmi les pancartes brandies ce vendredi, on pouvait lire : "Le hirak est intact", "Le système est pourri" et "La lutte se poursuivra jusqu'à ce que yetnahaou gaâ". "Et contrairement à ce que certains tentent de faire accroire, ces gens-là ne sont pas des traîtres à la nation et ne travaillent pas à détruire l'Algérie. Ils veulent juste récupérer leur liberté pour vivre en paix, dans un pays dirigé par des gens propres et intègres", conclut un animateur du hirak. La marche de ce vendredi a été marquée par la présence de deux figures de la lutte contre le système, à savoir Hadj Gharmoul, qui vient de purger six mois de prison pour s'être dressé contre le 5e mandat, et Tahar Belabbes, porte-parole des chômeurs d'Ouargla, lesquels ont été longuement applaudis.