Le président de l'APN n'a pas tari d'éloges sur Ahmed Gaïd Salah. Son homologue du Conseil de la nation a fait un plaidoyer contre la primauté du civil sur le militaire. Les présidents de l'APN et du Conseil de la nation n'ont pas dérogé à la règle consistant à encenser à outrance l'homme fort du régime. Les panégyriques destinés, depuis de longues années au président déchu Abdelaziz Bouteflika, sont désormais réservés au général de corps d'armée, Ahmed Gaïd Salah. Slimane Chenine, qui n'avait jamais rêvé de trôner un jour au perchoir de l'Assemblée nationale, n'était un concours de circonstances provoqué par l'insurrection populaire, n'a pas tari d'éloges, dans son discours d'ouverture de la session parlementaire 2019-2020, sur le vice-ministre de la Défense nationale. Ce dernier, au regard du président de la première Chambre du Parlement, "accompagne le peuple dans l'accomplissement de ses revendications avec raison et réalisme (…) et soutient, de manière sérieuse et responsable, la lutte contre la corruption et la justice qui s'est libérée en un temps record (...)". Droit dans ses bottes, Slimane Chenine cautionne inconditionnellement l'organisation d'une élection présidentielle à brève échéance : "Le temps impose, aujourd'hui, à tout un chacun d'aller rapidement vers la consécration de la légitimité populaire, à travers l'élection présidentielle avant la fin de l'année en cours." Il puise sa conviction des paroles du général de corps d'armée, Gaïd Salah. "Les mauvaises langues n'ont plus de prétexte, maintenant que l'institution militaire a tranché en faveur de l'organisation de l'élection présidentielle avant la fin de l'année en cours", a-t-il attesté, ajoutant que nul ne doit douter du bien-fondé de cette feuille de route : "L'institution militaire a prouvé à tous, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur, qu'elle est une institution républicaine (...) qui fait appel aux urnes et à la volonté populaire, dans un environnement politique et juridique propice à même de conférer suffisamment de crédibilité au prochain scrutin." Dans un déni total de la réalité du terrain, le successeur de Mouad Bouchareb n'a, à aucun moment, évoqué les véritables exigences du peuple. Pourtant, pendant son discours acquis au régime, des dizaines de milliers d'étudiants, d'enseignants universitaires et de citoyens scandaient dans la rue Zighoud-Youcef face au palais parlementaire : "Makanch l'vote mâa shab l'kaskrout" (Pas de vote avec les inféodés), "Vous êtes tous des voleurs" et les slogans habituels hostiles à Gaïd Salah. Au Conseil de la nation, le président par intérim, Salah Goudjil, a clairement justifié les incursions du chef de l'institution militaire dans le débat politique et sa promptitude à se substituer au chef de l'Etat. En remontant l'histoire, il a assuré que le premier noyau de l'ALN était formé par des politiques civils qui ont pris les armes contre le colonisateur français. "La question de la primauté du civil sur le militaire posée au Congrès de la Soummam en 1956 a été évacuée du débat au congrès du Caire une année plus tard", a-t-il raconté, relevant qu'il est hérétique, aujourd'hui, de déterrer ce principe resté au stade de concept conflictuel entre leaders de la guerre pour l'indépendance de l'Algérie. L'intérimaire d'Abdelkader Bensalah a incité à admettre la nouvelle mission de l'armée : engager rapidement le pays dans un processus électoral qui le dotera d'un président élu. "C'est ce qui importe aujourd'hui. Le plus important, à savoir les réformes et les changements, interviendra après le scrutin", a-t-il moralisé, circonscrivant la demande du peuple, qui manifeste depuis plus de six mois, à cet acte électoral.