Pour tenter de casser la dynamique du mouvement populaire et imposer son calendrier électoral, le pouvoir procède à des arrestations. L'objectif est de faire peur aux manifestants. Mais cela ne marche visiblement pas. Karim Tabbou, Samir Benlarbi et des dizaines d'anonymes. Depuis quelques jours, les autorités procèdent à des arrestations en masse. Parmi les manifestants ou au sein des figures du mouvement populaire, les arrestations et les mandats de dépôt se multiplient à un rythme effréné. Le but recherché est d'affaiblir un mouvement populaire qui ne perd rien de sa vigueur. Dès l'arrestation spectaculaire du militant politique Karim Tabbou, la semaine dernière, quelques heures seulement après un discours musclé du chef d'état-major de l'ANP, d'aucuns ont compris que le pouvoir est monté d'un cran dans sa répression des manifestations populaires. La réponse des Algériens ne s'est pas fait attendre : tout en gardant le caractère pacifique de la révolution, ils se sont mobilisés pour condamner, unanimement, ces arrestations suivies d'emprisonnement. "Karim Tabbou avait l'habitude de marcher à Alger. Ce vendredi, il a marché dans toute l'Algérie", a résumé l'activiste Samir Belarbi après la marche de vendredi dernier. L'homme ne tardera pas à connaître le même sort que son ami. Il est à son tour arrêté et jeté en prison, à El-Harrach plus précisément. Pour l'arrêter, le pouvoir a utilisé les mêmes méthodes : une interpellation sur la place publique, sans présentation de mandat d'amener et sans respect des procédures. Ces arrestations, qui s'ajoutent à celles de dizaines de manifestants, procèdent d'une volonté d'imposer un calendrier électoral. "Vu la radicalité de la revendication pour le changement, d'aucuns diront qu'en fin de compte c'est la seule manière pour les généraux d'imposer leur candidat afin de préserver le système, avec, évidemment, de nouvelles figures et l'apparence d'un peu de sérieux dans la gestion des affaires publiques", explique, à Liberté, le politologue Mohamed Hennad, qui estime que les arrestations ne vont pas s'arrêter. "Il faut s'attendre à plus de restrictions des libertés de parole et de mouvement", avertit-il. Selon toute vraisemblance, le rythme des arrestations va s'accélérer dans les prochains jours, craint Mohamed Hannad. "Il y a fort à parier que des arrestations, ciblées, iront crescendo d'ici au rendez-vous électoral", indique le politologue. Une prédiction qui s'est confirmée, puisqu'hier plusieurs manifestants ont été arrêtés dès le début de la marche des étudiants. Ce qui n'a pas empêché une forte mobilisation. En effet, comme vendredi dernier, des milliers d'étudiants et de citoyens sont sortis manifester hier pour dire non à l'élection présidentielle et pour insister sur le rejet du système. Ils ont ainsi bravé la répression.