Le chef de l'institution militaire, le général de corps d'armée Ahmed Gaïd Salah, a fustigé, hier dans un discours prononcé à la 2e Région militaire, à Oran, les "parties étrangères hostiles qui complotent contre l'Algérie et qui tentent de s'immiscer dans ses affaires internes avec une complicité flagrante de la bande, à l'intérieur". Il les a averties de cesser de "jouer avec le feu" dans ce qu'il a qualifié de "tentatives désespérées qui ont essentiellement pour but de porter atteinte à la stabilité et à la sécurité de l'Algérie et de son peuple". Le vice-ministre de la Défense nationale s'est appuyé dans sa démarche sur la volonté affichée des manifestants, depuis le début de l'insurrection populaire contre le régime, de ne tolérer aucune ingérence étrangère. À l'époque, les citoyens se sont soulevés contre la propension du président déchu, Abdelaziz Bouteflika, à chercher des soutiens à l'extérieur (il a confié cette mission, au mois de mars dernier, à deux émissaires, Lakhdar Brahimi et Ramtane Lamamra). "Ce peuple authentique (…) a exprimé, à travers ses marches pacifiques dont le civisme a été salué par le monde entier, son refus catégorique de toute ingérence étrangère dans les affaires internes de son pays, et il n'accepte de recevoir aucune leçon, de quelque partie que ce soit", a-t-il mis en évidence, rappelant, au passage, la position du haut commandement de l'armée. "J'ai également affirmé à maintes reprises que ce qui se passe en Algérie est une affaire interne qui concerne seulement les Algériens", a-t-il soutenu. Il a clos ce chapitre en conseillant aux destinataires de son message de se préoccuper plutôt "de leurs affaires et des problèmes de leurs pays". Certes, le général de corps d'armée, Ahmed Gaïd Salah, n'a pas désigné nommément et clairement les "parties" visées par ses remontrances, mais d'aucuns auront compris, néanmoins, qu'il s'adressait au Parlement européen, qui a pris fait et cause, samedi dernier, pour la révolution, par le truchement de la présidente de la sous-commission des droits de l'Homme du Parlement européen, Marie Arena. Dans une déclaration publique, cette dernière a tranché sur la légitimité des revendications de la rue, en révolte depuis plus de sept mois. "Les manifestants, ce sont des hommes, des femmes, des jeunes, des moins jeunes qui demandent la démocratie en Algérie. Nous les soutenons ici au Parlement européen en organisant une audition avec un certain nombre d'acteurs de la révolution actuelle en Algérie", a-t-elle annoncé. Ce n'est, certes, pas le premier soutien à la révolution, émanant de l'étranger (Union européenne, USA, diplomates, personnalités…), mais peut-être le plus franc et le plus engagé, ne serait-ce que par le projet d'écouter des animateurs du hirak. L'annonce de Marie Arena a d'ailleurs suscité une polémique sur les réseaux sociaux entre partisans et opposants à l'internationalisation de la crise algérienne.