Pour dénoncer la répression du pouvoir et soutenir les détenus d'opinion, les Algériens se sont inventés de nouvelles manières de protester. Jeudi soir, des quartiers de la capitale et d'autres villes ont vécu au rythme de concerts de klaxons et de bruits de casseroles et autres ustensiles de cuisine. Objectif : afficher la solidarité avec les détenus politiques et réclamer leur libération. Comme pour chaque action de protestation, les Algériens se sont donné le mot sur les réseaux sociaux. Estimant que les marches populaires des mardis et vendredis ne suffisent pas, certains activistes et animateurs de pages sur les réseaux sociaux ont donc décidé d'innover. Voulant rester dans le principe de l'action pacifique, ces activistes ont appelé à un acte qui doit faire du bruit sans risquer de se faire arrêter et surtout sans risque de créer des désagréments aux habitants. À 20h, dans tous les ménages, les coups de fourchettes, de louches et autres casseroles devaient fuser de tous les foyers d'Alger et d'autres villes. Et les habitants du centre d'Alger et d'autres quartiers ont répondu présent. Outre ce geste provenant des ménages, les automobilistes ont produit un concert de klaxons qui a duré quelques minutes. Une action qui a créé une ambiance de fête, mais a portée politique. Les images diffusées sur les réseaux sociaux montrent que les rues de la capitale ont résonné du concert de klaxons qui ont été actionnés durant quelques minutes. L'action, entamée à Alger, s'est propagée dans le reste du pays. À Béjaïa, des habitants ont organisé un sit-in au centre-ville. Des femmes et des hommes ont "exécuté" les bruits de casseroles et autres ustensiles en pleine rue. Des activistes et militants ont également profité de la soirée pour prendre la parole afin d'exiger la libération des détenus d'opinion et de réitérer la demande de départ des symboles du système et le refus de l'élection présidentielle du 12 décembre prochain. Cette manière de protester a déjà été utilisée durant la guerre de Libération nationale. Un souvenir que certains cercles proches du pouvoir tentent d'utiliser pour réfuter le parallèle qui peut être fait entre les deux époques. Ce n'est pas la première fois que le mouvement populaire innove dans sa manière de lutter contre le système. Avant le début de l'été, les animateurs du mouvement populaire avaient appelé à une grève générale. Cela n'avait marché que partiellement. C'était le début de la menace de la désobéissance civile, promise en août dernier. Mais l'idée, qui divise les rangs des manifestants à cause de la peur qu'elle suscite, a vite été abandonnée. Depuis quelques jours, d'autres idées émergent au sein du hirak. À commencer par l'organisation d'une manifestation, dimanche dernier, devant l'Assemblée populaire nationale pour protester contre l'adoption du projet de loi sur les hydrocarbures. Le rassemblement s'est même transformé en marche populaire. En outre, de nombreux citoyens ont décidé de rejoindre les manifestations des étudiants. Ce qui donne une continuité à la lutte des Algériens qui poursuivent, ainsi, leur "révolution du sourire".