L'alignement du Chef du gouvernement britannique sur Washington provoque de sérieuses réserves dans les milieux politiques à Londres et au sein même du parti travailliste. Seulement, 13% des sujets de la reine Elizabeth II soutiennent une participation de la Grande-Bretagne à une intervention militaire américaine en Irak. Cet avis est partagé par des militants du Parti travailliste que dirige Tony Blair, mais également par des ministres. L'un des principaux ministres du patron de Downing Street, en l'occurrence Clare Short, s'est clairement opposé à une action unilatérale sans l'accord de l'ONU. Il estime que la Grande-Bretagne doit rester sur “la voie de l'ONU” pour empêcher les Etats-Unis de s'engager seuls dans une guerre. Selon un sondage de la chaîne de télévision privée ITV, 58% des Britanniques estiment que le président irakien Saddam Hussein ne constitue pas une menace suffisante pour justifier une guerre contre son régime. En revanche, 53% d'entre eux approuvent l'envoi de soldats britanniques au combat, si le feu vert est donné par l'ONU. Devant cette vague de contestations, Tony Blair a modéré ses propos lundi dernier, lors de sa conférence de presse mensuelle, en déclarant que la question du désarmement de l'Irak est entre les mains des Nations unies et de ses inspecteurs. “Nous avons dit que nous devions suivre le chemin de l'ONU. Nous avons également dit que s'il y avait une violation des résolutions, il y aurait d'autres discussions aux Nations unies”, a-t-il affirmé avant de préciser : “S'il y a violation, nous nous attendons que les Nations unies respectent les engagements qui ont été donnés. Je n'ai aucun doute sur le fait qu'elles le feront.” Par ces propos, le Premier ministre britannique veut probablement ménager les opposants à une guerre contre l'Irak au sein de son propre parti, de son gouvernement et de l'Union européenne aussi. Concernant le rapport que présenteront au Conseil de sécurité, le 27 janvier prochain, le chef des inspecteurs onusiens, Hans Blix, et le directeur général de l'Agence internationale de l'énergie atomique, Mohammed El-Baradei, Tony Blair dira : “Le 27 janvier est la date de remise du premier rapport complet, et alors, je pense que les choses seront un peu plus claires.” Cela dit, il ne s'est pas empêché de réaffirmer que la Grande-Bretagne entendait agir aux côtés des Etats-Unis contre l'Irak. Ces déclarations ont été confirmées par l'envoi, samedi dernier du plus important déploiement naval britannique depuis la guerre des Malouines en 1982, parallèlement au départ de nouvelles troupes américaines dans le Golfe. Les déclarations de Blair sur l'importance du rôle de l'ONU dans le conflit avec l'Irak semblent destinées à la consommation interne pour apaiser la contestation, car sa détermination à s'aligner sur Washington est clairement traduite par sa phrase : “N'ayez aucun doute. s'il y a une violation de la résolution de l'ONU qui a été adoptée, alors l'action suivra.” Ce qui est clair, net et précis. Il ne fait plus aucun doute que Londres suivra Washington dans toute action contre Bagdad, bien que le Chef du gouvernement britannique tente de calmer la contestation locale par un discours modéré. Jusque-là, toutes ses tentatives de convaincre ses concitoyens du danger que représentent les armes de destruction massive développées par Bagdad se sont avérées vaines. K. A. El Baradei : “Les inspecteurs ont encore besoin de quelques mois” Les inspecteurs en désarmement en Irak ont encore besoin de "quelques mois" pour mener à bien leur mission, a déclaré lundi à Paris le directeur de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Mohamed El Baradei. Les inspecteurs ont encore besoin "de quelques mois pour terminer leur mission", a-t-il affirmé lors d'un point de presse à l'issue d'une rencontre avec le ministre français des Affaires étrangères, Dominique de Villepin. Il a indiqué ne pas pouvoir fixer de date exacte pour la fin de la mission des inspecteurs et a minimisé l'importance de l'échéance du 27 janvier en soulignant que le rapport soumis à cette date au Conseil de sécurité de l'Onu était "un rapport d'étape ». El Baradei a également réclamé de l'Irak une "coopération active" et non passive comme cela est actuellement le cas. "L'Irak coopère de façon passive et nous souhaitions une coopération active", a-t-il déclaré. MM. El Baradei et de Villepin ont tous deux souligné lors de ce point de presse que le recours à la guerre en Irak était la pire des options. "La région n'a pas besoin d'une nouvelle guerre", a ainsi déclaré M. de Villepin, approuvé en ce sens par M. El Baradei.