Un vaste élan de solidarité s'est constitué ces derniers jours autour des manifestants pacifistes victimes de brutalités des forces de sécurité, notamment en Kabylie, lors des incidents ayant émaillé le scrutin présidentiel du 12 décembre dernier. À Béjaïa, on dénombre une dizaine de blessés, dont deux jeunes gravement atteints par des bombes lacrymogènes, lors des émeutes qui ont éclaté jeudi et vendredi derniers dans plusieurs localités de la région. À Akbou, un jeune plombier de 22 ans, Kader Aït Amari, a perdu un œil dans la soirée du vendredi 13 décembre, après qu'un policier lui a lancé une grenade lacrymogène en plein visage, alors qu'un autre jeune manifestant, originaire de la commune de Tizi n'Berber (Aokas), touché par un même projectile à la tête, a eu un traumatisme crânien. La gravité de ces deux cas a soulevé une vague d'indignation au sein de la population locale, qui leur a manifesté un formidable élan de solidarité. Outre le nombre impressionnant de visiteurs reçus par ces deux patients hospitalisés au CHU Khellil-Amrane de Béjaïa, des animateurs du hirak et des acteurs de la société civile se sont mis de la partie en se lançant dans des actions humanitaires, telles que la collecte de fonds afin d'apporter aide à leurs familles. Outre la prise en charge médico-chirurgicale, ces aides devront permettre aux victimes de faire face à leurs besoins, notamment en matière d'assistance judiciaire. Car, selon certains activistes du hirak à Béjaïa, ces familles éprouvées s'apprêtent à constituer un collectif d'avocats pour porter plainte contre les auteurs de ces violences. "Nous allons exiger que toute la lumière soit faite sur ces brutalités, en vue de situer les responsabilités. Leurs auteurs et leurs commanditaires doivent être poursuivis et punis par la justice. Qui veut semer la violence après dix mois de manifestations pacifiques qui ont suscité l'admiration du monde entier ?" nous dira le militant d'Akbou Zahir Benkhellat. En signe de solidarité avec les blessés et pour dénoncer les brutalités des services de sécurité, les animateurs du mouvement populaire préparent d'autres actions de rue. Ainsi, un rassemblement citoyen est prévu, ce soir, à la place Katia-Bengana, dans la ville d'Aokas. Les manifestants sont invités à porter un bandeau sur l'œil, en soutien aux manifestants éborgnés. Une nouvelle façon de protester contre la violente répression qui s'abat sur les manifestants du hirak.