Le juge qui a prononcé la liberté provisoire pour ce militant a justifié l'ajournement du procès par le temps que nécessite l'examen du dossier qu'il n'a reçu que la veille. L'accès, hier, à la salle d'audience de la cour d'appel d'Oran, était rigoureusement filtré à l'occasion de la comparution de Kaddour Chouicha, une des figures de proue de la lutte pour les droits humains. Hormis les avocats, les journalistes, quelques membres de la famille de l'accusé et des justiciables, le public n'a pas été autorisé à assister au procès. L'accès à cette audience, pourtant publique, a été interdite aux nombreux amis et proches venus apporter leur soutien au vice-président de la Laddh. Ce qui a suscité la colère d'un des avocats de la défense qui a tenté, à l'ouverture de l'audience, de faire lever ces restrictions auprès du président. Mais le magistrat, qui a rétorqué que son domaine de compétence s'arrêtait aux limites de la salle, a invité les policiers à faire comparaître l'accusé. Manifestement affaibli, Kaddour Chouicha n'en a pas moins tenté de faire bonne figure en adressant des sourires rassurants à son épouse, à son fils et à quelques amis qui ont réussi à se glisser entre les travées. Il a discrètement serré la main à quelques avocats venus de lointaines wilayas pour prendre sa défense : l'on pouvait reconnaître Mes Zoubida Assoul, Nabila Smaïl, Mustapha Bouchachi, Noureddine Ahmine, Noureddine Benissad, Hakim Saheb et bien d'autres venus de différents barreaux, aux côtés de Fatima-Zohra Meziane, Farid Khemisti, Ahmed Mebrek ou encore Abderrazak Fodil, qui font partie du collectif de défense du hirak à Oran. Le président qui s'est inquiété de la santé de Kaddour Chouicha a annoncé son intention de reporter le procès à une date ultérieure en expliquant que le dossier n'étant parvenu que la veille, la cour n'avait pas eu le temps de l'examiner. Les avocats de la défense ont immédiatement introduit une demande de libération, requête à laquelle le représentant du ministère public ne s'est pas opposé, ce qui a provoqué un soupir de soulagement chez la défense et la famille de l'accusé. Au président d'audience qui saluait les avocats d'être venus de "si loin", Nabila Smaïl a eu cette réponse très militante : "On reviendra. L'éloignement est entre l'homme et la liberté." Après avoir suspendu l'audience quelques minutes, le juge est revenu pour annoncer l'ajournement du procès au 28 janvier et la remise en liberté provisoire de Kaddour Chouicha. Décision qui a été accompagnée de youyous et de cris de joie chez les proches de l'accusé dont certains ont même fondu en larmes. Dehors, dans la salle des pas perdus, les avocats ont été accueillis par un tonnerre d'applaudissements d'une foule de citoyens qui ont tenu à rendre hommage à ces robes noires qui, depuis des mois, travaillent inlassablement à la libération des détenus politiques. "Justice libre et indépendante", "Libérez les détenus", ont également scandé ces manifestants félicitant la famille Chouicha pour la libération tant espérée de Kaddour. "Cette décision démontre que la justice est sur la voie de l'indépendance", a estimé Me Khemisti tandis que Me Mebrek y a vu le "signe" de la libération prochaine de tous les prisonniers d'opinion "qui sont détenus à tort". Me Noureddine Benissad a, de son côté, exprimé sa satisfaction de voir "Kaddour Chouicha, qui a été condamné sans fondement, pour avoir exprimé son opinion, retrouver sa liberté. Nabila Smaïl, quant à elle, a souhaité "célébrer prochainement la libération de l'Algérie après avoir fêté l'élargissement du militant Kaddour Chouicha". Aujourd'hui, Jawad Belkacem est le seul détenu du hirak qui n'a pas encore été libéré. Sauf mesure de dernière minute, il devrait quitter la prison d'Oran en février.