Ils ont déclenché un mouvement de protestation dans plusieurs wilayas et menacent de ne pas servir ce produit aux détaillants. Dès son installation à la tête du département du Commerce, Kamel Rezig multiplie ses discours menaçants à l'adresse des différents acteurs du marché. Le ministre vient d'engager un sérieux bras de fer avec les distributeurs de lait en sachet subventionné qu'il menace de poursuites judiciaires dans le cas où ils ne respecteraient pas le prix administré de 25 DA le sachet d'un litre. "Quiconque veut tester la force de l'Etat après une semaine le verra, que ce soit un revendeur ou un distributeur de lait… Je ne suis pas menaçant, mais tout le monde verra la puissance de l'Etat", a-t-il lancé tout de go lors d'une récente rencontre. Il renchérit : "Je jure devant Dieu, je n'aurai aucune pitié." Ce sont des propos sibyllins ou pour le moins inappropriés pour un ministre de la République qui semble vouloir livrer une véritable bataille contre ce qu'il appelle la "mafia du lait", mais encore faut-il qu'il ait les moyens de sa politique quand on connaît les échecs successifs essuyés, dans ce sens, par ses prédécesseurs. Réponse du berger à la bergère, les distributeurs ont rapidement déclenché un mouvement de protestation, dans plusieurs wilayas et certains ont menacé de ne pas servir ce produit aux détaillants, si cette condition leur serait imposée. Le président de la commission nationale des distributeurs de lait, Amine Bellour, affirme que le montant de leur marge bénéficiaire doit être revu car il est dérisoire. Il n'a pas été actualisé depuis des années, argue-t-il, alors que les prix du gasoil et de la pièce détachée notamment ont augmenté. "Nous sommes pour la réglementation et le respect du prix du lait subventionné par l'Etat, mais le ministère du Commerce doit examiner nos revendications", indique-t-il. "Avec une marge bénéficiaire de 90 centimes par sachet, peut-on couvrir le salaire du chauffeur et le coût du gasoil ?", s'interroge-t-il. Pour Amine Bellour, la décision prise par le ministère du Commerce ne respecte pas la marge bénéficiaire des distributeurs. Il faut dire que la problématique du lait est posée depuis des décennies sans que les pouvoirs publics réussissent à la résoudre. Le ministère de tutelle a essayé précédemment de mettre un terme aux récurrentes perturbations qui caractérisent le marché du lait sans pouvoir toutefois atteindre son but. L'on se rappelle du dispositif de traçabilité de la poudre de lait, à partir de l'étape d'approvisionnement jusqu'à l'arrivée du produit fini chez les commerçants au détail, mis en place par les départements de l'Agriculture et du Commerce. Les deux ministères avaient également promis des opérations de contrôle plus rigoureux notamment sur les destinations de la poudre de lait et du produit fini sur le marché. Ils ont mis en œuvre aussi une démarche de traçabilité au sein de la filière à travers l'introduction d'une "nouvelle clause" dans la convention liant l'Office national interprofessionnel du lait (Onil) aux propriétaires des laiteries. Les responsables de ces unités sont en principe tenus de présenter un document détaillant les quantités produites et distribuées sur lequel figureront les cachets apposés par les distributeurs, dans le but de définir le circuit réel du lait subventionné. Les transformateurs doivent présenter, chaque fin de mois, un document détaillé reprenant les quantités produites et les quotas des distributeurs sur lequel seront apposé s les sceaux des commerçants au détail du lait pasteurisé. Autant de mesures qui se sont avérées inutiles puisque la crise du lait persiste.