Renforcement des libertés, séparation des pouvoirs et régulation de la presse, dans son plan d'action qui va être présenté mardi devant les députés, le gouvernement sort sa grande rhétorique. Dans le plan d'action du gouvernement, dont Liberté s'est procuré une copie, le gouvernement entend opérer beaucoup de changements. À commencer par la suppression du recours aux autorisations administratives pour l'organisation de manifestations et réunions publiques. Il suffira désormais d'une simple déclaration pour tenir une réunion publique ou créer une association. "En tenant compte des évolutions politiques et sociales qu'a connues notre pays, il sera procédé à l'adaptation du cadre juridique régissant les réunions publiques, qui seront désormais soumises au régime de la déclaration", note le projet de la déclaration de politique générale du gouvernement que présentera Abdelaziz Djerad. Ce système déclaratif sera également consacré pour la création d'associations de tous genres. "La consécration du principe de la déclaration dans la constitution des associations" fait, en effet, partie des nouvelles dispositions qui seront prises dans le cadre de la révision de la loi sur les associations, précise le document du gouvernement. En outre des réformes politiques qui vont notamment "garantir le droit de manifestations politiques", le gouvernement promet également plus de "prérogatives" au Parlement. Sans entrer dans les détails, le document prévoit par exemple qu'après la révision de la Constitution, les membres du gouvernement seront "obligés" d'assister aux travaux du Parlement. "Le gouvernement inscrit parmi ses priorités l'engagement total et entier de ses membres à assister aux travaux parlementaires et de répondre aux questions orales et écrites des membres du Parlement dans les délais fixés par la Constitution. Il s'engage également à présenter annuellement la déclaration de politique générale", précise ainsi le texte. Plus que cela, le gouvernement promet d'œuvrer "à étudier toute proposition de loi émanant des membres du Parlement, et affirmera son entière disponibilité à examiner l'ordre du jour proposé par l'opposition parlementaire. Conformément aux dispositions constitutionnelles, le gouvernement s'engage à assurer le suivi de la prise en charge des problèmes soulevés par les parlementaires et à respecter et coopérer pleinement lors de la mise en œuvre des mécanismes". En plus des domaines politiques et institutionnels, le gouvernement promet d'étendre les réformes au secteur de la justice. Ainsi, le plan d'action du gouvernement prévoit de réduire le taux de la détention provisoire avec la réintroduction du "flagrant délit". Il prévoit, entre autres, "la révision de la procédure de comparution immédiate ayant généré l'augmentation du taux de la détention provisoire, de sorte à la faire coexister avec la procédure de flagrant délit qui sera réintroduite". À cela, il faut ajouter la promesse de "la généralisation du recours aux peines alternatives à la prison, notamment le travail d'intérêt général", promet le gouvernement. Pour "garantir" une "indépendance" de la justice, le gouvernement promet également "des mécanismes" qui seront "mis en place afin de protéger l'indépendance du magistrat et de son intégrité et de valoriser son statut". Il prévoit également que "la révision du système de recrutement et de formation des magistrats sera également entreprise, en vue de garantir une meilleure protection de la société et la sauvegarde des droits et libertés". Dans le domaine de l'éducation, le projet du gouvernement promet la "généralisation" de l'utilisation de la langue arabe dans les filières techniques et l'élargissement de l'introduction de la langue amazighe dans le système éducatif. Fait inédit, le projet gouvernemental prévoit une possible intervention de l'armée algérienne dans le règlement des conflits, sous l'égide des organisations internationales. "L'Armée nationale populaire (…) développera les actions de coopération internationale bilatérale et multilatérale dans le domaine militaire, dans le but d'accroître ses moyens en équipements et ses capacités d'action, pour promouvoir les espaces de sécurité et de stabilité, et apporter sa contribution aux opérations de maintien de la paix, notamment en Afrique, sous l'égide des organisations internationales", lit-on, ainsi, dans le document que lira Abdelaziz Djerad devant les parlementaires.
La presse, une ouverture sans caution Parmi les sujets développés par le gouvernement, le sujet de la liberté de la presse et d'expression reste confus. Tout en promettant une grande liberté d'expression, le plan d'action du gouvernement alterne prudence et ouverture mitigée. Ainsi, tout en affichant ses craintes de voir les nouveaux modes de communication submerger le champ de l'information, le gouvernement promet de revoir certains textes de lois. Tout en constatant que "la transformation profonde du secteur de l'information et de la communication exige du gouvernement le lancement de réformes majeures, inclusives et concertées", il propose "de procéder à une révision substantielle des lois relatives à l'information et à l'audiovisuel, avec notamment une mise en conformité avec le droit algérien des chaînes de télévision offshore et l'encouragement de la création de radios dans l'espace hertzien et sur le web". Laissé en jachère depuis des années, le domaine de la publicité et du sondage pourra probablement être pour une fois régularisé. Ainsi, la déclaration politique du gouvernement prévoit "de fixer des cadres légaux pour la publicité, les sondages et la presse numérique". Ces secteurs ne sont toujours pas régis par des textes réglementaires. La publicité est toujours gérée politiquement, puisque la publicité étatique sert notamment de moyen de pression sur les médias libres. La presse numérique, tout comme les chaînes de télévision, fonctionnent en dehors de la loi depuis des années. Visiblement soucieux de "bien" communiquer, le gouvernement veut faire la promotion de sa politique. "(…) La communication est de toute évidence un immense défi à relever, d'autant plus grand qu'il s'agit d'assurer désormais la promotion des réformes constitutionnelles, institutionnelles et des politiques publiques, chantiers immenses de la nouvelle République à laquelle œuvre le président de la République depuis son élection le 12 décembre 2019", lit-on dans le texte qui promet un "exercice libre et apaisé" des libertés mais "loin des atteintes" à ces mêmes libertés !
Ali Boukhlef
"(…) Le gouvernement révisera en profondeur le dispositif légal encadrant ce droit, en renforçant les garanties de l'exercice de la liberté de manifestation pacifique en tant qu'acte de civisme exercé loin de toute forme de violence et dans le respect des lois de la République." "En tenant compte des évolutions politiques et sociales qu'a connues notre pays, il sera procédé à l'adaptation du cadre juridique régissant les réunions publiques, qui seront désormais soumises au régime de la déclaration." La refonte de la loi sur les associations vise à "renforcer le rôle des associations et leur participation dans le processus de développement du pays et la gestion des affaires publiques", s'appuiera principalement sur : - la consécration du principe de la déclaration dans la constitution des associations ; -l'adoption de nouveaux mécanismes de financement transparents et efficaces. Une révision sera initiée du statut de la magistrature et de la loi régissant le Conseil supérieur de la magistrature, ainsi que de la Charte de déontologie de la profession de magistrat et de la fonction d'inspection ; l'objectif visé est la consécration de l'indépendance de la magistrature et de la moralisation du travail judiciaire. (…) Il sera question d'aider les acteurs de l'information et de la communication à s'organiser dans le cadre d'associations et de syndicats professionnels et à soumettre le libre exercice d'informer à l'exigence éthique qui sera défendue dans des cadres organisés. (…) Le gouvernement entend promouvoir et consolider les langues arabe et tamazight à travers notamment la généralisation de l'utilisation de la langue arabe dans les domaines scientifique et technologique et la consolidation et le renforcement de l'usage de tamazight dans le système éducatif. Le gouvernement inscrit parmi ses priorités l'engagement total et entier de ses membres à assister aux travaux parlementaires et de répondre aux questions orales et écrites des membres du Parlement dans les délais fixés par la Constitution. Il s'engage également à présenter annuellement la déclaration de politique générale. S'agissant des hydrocarbures non conventionnels, le gouvernement, tout en intensifiant les efforts d'identification du potentiel que recèle notre sous-sol, engagera les études appropriées sur l'impact de l'exploitation de cette richesse aux plans économique, social et environnemental, en veillant à ce que toute exploitation envisagée préserve la santé du citoyen, les écosystèmes et, en particulier, les ressources hydriques.