Les citoyens tirent la sonnette d'alarme tout en s'inquiétant de ce que le phénomène en question soit devenu l'une des grandes préoccupations de la population locale. Les citoyens, amis et parents des harraga portés disparus depuis quelques mois, se sont mobilisés hier devant l'APC, pour poursuivre les recherches des harraga disparus en mer, après le naufrage de leur barque où se trouvaient des jeunes qui voulaient rejoindre l'Europe. Ces derniers ont pris le large depuis les côtes de Sidi Lakhdar à bord d'une petite embarcation de fortune qui est tombée en panne dans les eaux territoriales espagnoles. Suite à cela les candidats à l'émigration clandestine ont tenté de rejoindre la côte à la nage. Les familles ont revendiqué auprès des autorités algériennes, à leur tête le ministère des Affaires étrangères, la création d'une commission qui se chargera d'enquêter sur la disparition de leurs proches depuis le mois d'octobre dernier. Sur place, ils ont déployé des banderoles et brandi une pancarte avec les portraits des disparus. "Ramenez nos enfants ! Rendez-nous nos frères", ont scandé les manifestants. Selon eux, il est fort probable que les harraga disparus soient détenus dans des prisons à l'étranger, en particulier en Espagne. Les réseaux de passeurs dans les wilayas de l'Ouest sont nombreux, car les candidats à la harga le sont aussi. Souvent, les migrants finissent dans les filets des gardes-côtes. Mais de plus en plus de drames sont, également, enregistrés au large des côtes algériennes, endeuillant des familles entières. Fatima, 49 ans, est une mère de famille à la recherche de son fils disparu depuis le mois d'octobre dernier. Il a pris la mer pour l'Espagne avec un groupe de jeunes. Depuis, sa famille est sans nouvelles : "Je cherche mon fils depuis le mois d'octobre. On m'a dit qu'il a pris la mer avec 14 autres personnes depuis Kef Lasfar." Des vidéos de harraga mettant le cap sur l'Espagne circulent sur les réseaux sociaux. Ces Algériens risquent leur vie dans des embarcations de fortune en direction de l'autre rive de la Méditerranée. Ali, âgé de 23 ans, habitant au quartier populaire, a déjà tenté de traverser la mer à trois reprises. Ces tentatives ont échoué, mais il ne perd pas "espoir" : "De ma vie, je n'ai rien fait encore. J'ai quitté les bancs de l'école très tôt. Je vivais de petits boulots. J'ai revendu des pièces usagées, des téléphones portables, des vêtements, mais un jour j'ai voulu partir à la découverte de meilleurs horizons. J'ai tenté ma chance trois fois. En vain." Des citoyens nous ont confié également que des dizaines de tentatives d'émigration clandestine depuis la côte de la wilaya de Mostaganem, via la mer, ont avorté. Ils tirent ainsi la sonnette d'alarme tout en s'inquiétant de ce que le phénomène en question soit devenu l'une des grandes préoccupations de la population locale. "Maintenant, les parents sont vraiment inquiets en raison de l'ampleur de la harga. Ils ont peur pour leurs enfants car, aujourd'hui, avec le manque de communication entre les membres d'une même famille, cela peut s'avérer un véritable danger", nous explique un autre père de famille. Et de préciser que les mauvaises conditions sociales poussent les jeunes à aller chercher le confort sous d'autres cieux plus cléments. Notre interlocuteur ajoute que les localités côtières de Mostaganem sont très pauvres. Il n'y a ni agriculture ni industrie pouvant résorber le taux de chômage galopant chez les jeunes. "Notre région est délaissée par les pouvoirs publics. Il n'y a aucune usine ni autre activité susceptibles de diminuer un tant soit peu le nombre de chômeurs", se désole-t-il, tout en suggérant l'organisation de campagnes de sensibilisation contre la harga. Selon lui, il y a des personnes qui sont manœuvres pendant plusieurs années juste pour réunir la somme nécessaire pour prendre le large, alors que souvent l'aventure est périlleuse. Notons que les gardes-côtes ont déjoué ces derniers jours plusieurs tentatives de joindre la rive ibérique à bord d'embarcations de fortune depuis les côtes de Mostaganem.