L'Exécutif continue d'alterner le discours lénifiant à l'égard du hirak et les accusations de "manipulations", comme pour justifier probablement la gestion parfois "musclée" des manifestations. Doublement confronté à la menace d'une grave crise économique et des pressions d'un hirak qui est encore loin d'avoir dit son dernier mot, le gouvernement semble peiner à trouver la panacée. Entre les velléités d'étouffement du mouvement, comme en témoignent la répression de la marche de samedi dernier, la poursuite des arrestations, la chape de plomb imposée aux médias, les entraves à l'exercice politique et la crainte de graves dérapages aux conséquences imprévisibles dans un contexte sécuritaire délétère dans ses dimensions sociales et politiques, le gouvernement continue d'alterner le discours lénifiant à l'égard du hirak et les accusations de "manipulations", comme pour justifier probablement la gestion parfois musclée des manifestations. Dans un entretien accordé hier à l'agence officielle, le Premier ministre, Abdelaziz Djerad, a appelé le mouvement populaire à la mobilisation pour faire face à la crise, non sans estimer qu'il serait "plus sage d'atténuer la tendance revendicative et l'occupation excessive de la voie publique". "Devant l'ampleur de la tâche et des défis de l'heure, ainsi que devant la gravité de la situation économique et sociale actuelle du pays, il est attendu la mobilisation de toutes les parties pour sortir de cette crise multidimensionnelle, à travers une participation plus active du mouvement populaire principalement, dans la lourde tâche de construction de l'Etat rénové, auquel aspirent tous les enfants de notre pays (…)", a déclaré Abdelaziz Djerad. "Il serait plus sage d'atténuer la tendance revendicative et l'occupation excessive de la voie publique, qui ne fait qu'aggraver davantage la situation actuelle sans apporter de solutions concrètes aux différents problèmes auxquels font face les citoyens et citoyennes", estime-t-il. Sans répondre aux questions de fond que pose le hirak, ni encore s'expliquer sur l'absence de mesures d'apaisement, le Premier ministre prêche seulement la "sagesse" et la "compréhension" et suggère, en filigrane, l'existence de "manipulations". "La sagesse, la compréhension et la mobilisation des forces vives de la nation sont la seule voie qui permettrait une solution apaisée en vue d'assurer une sortie d'une crise politique, économique et sociale sans précédent et d'écarter toutes les manipulations avérées, qui ne sauraient diviser les enfants de ce pays, ni attenter à la cohésion nationale du peuple algérien." Selon lui, le mouvement populaire a "amorcé un processus irréversible de construction d'une Algérie nouvelle en rupture avec le système et les pratiques passées", et que son gouvernement "a inscrit son action dans le prolongement des revendications de ce hirak à l'action salvatrice, grâce à l'accompagnement et à la protection de l'Armée nationale populaire et des services de sécurité. Revoilà la "main étrangère" Ce discours, en apparence modéré, tranche pourtant avec celui de son ministre de l'Intérieur, des Collectivités locales et de l'Aménagement du territoire, lequel n'hésite pas à pointer du doigt des "parties étrangères" qui soutiennent des "éléments connus" pour pousser le mouvement à l'escalade. "Ces parties étrangères soutiennent des éléments connus aux intentions claires et œuvrent par leur biais à détruire le pays, pour le faire retourner aux années précédentes et le plonger dans des problèmes", a affirmé Kamal Beldjoud depuis la commune d'Ourlal, près de Biskra, puisant ainsi dans un registre aux relents de déjà-vu. "(...) il existe encore des éléments qui veulent détruire ce à quoi est parvenu le hirak populaire et sortent les mardis et vendredis avec les manifestants œuvrant pour l'escalade", soutient-il dans des propos repris par l'APS. Selon lui, l'Algérie est entrée dans l'ère de la "nouvelle république" dans laquelle le président de la République Abdelmadjid Tebboune s'est "engagé à concrétiser" toutes les revendications du hirak. Histoire probablement de rejeter les accusations ciblant l'attitude des services de sécurité, Kamal Beldjoud a "salué le professionnalisme" des éléments de la police dans leur "accompagnement" du hirak depuis plus d'une année, invitant le peuple algérien à faire "montre de vigilance". Dissonance, cafouillage ou gestion musclée du mouvement en perspective ?