Dans cet entretien, l'artiste peintre et professeur à l'Ecole des beaux-arts d'Alger partage avec nos lecteurs son quotidien durant cette période et nous parle plus en détail de ses projets ; "Confin'art" ainsi qu'une expo-vente au profit des nécessiteux. Même si les manifestations culturelles, les expositions et les concerts sont à l'arrêt, la créativité artistique est plus que jamais en effervescence. Liberté : Cette période de confinement est-elle plus propice à la création qu'en temps normal ? Et dans quel état êtes-vous, sachant qu'il n'y a plus d'expositions ni de vernissages, le monde culturel étant au point mort ? Karim Sergoua : Oui, effectivement, le monde culturel est au point mort, plus de vernissages, plus d'expositions, plus de rencontres, plus d'échanges, à cause de cette pandémie. Pour ce qui me concerne, c'est un moment propice pour se revoir, se poser des questions, se renouveler peut-être. Je suis bien sûr inquiet, stressé de ce qui se passe, mais en même temps cela me stimule énormément pour travailler et essayer de faire des choses à un niveau personnel. Je dessine, je peins, je fais des croquis et je monte des projets culturels et artistiques au niveau collectif (national et international) et, pour cela, les réseaux sociaux sont des plateformes idéales (expositions virtuelles, visiophones, conférences…). Justement, vous venez de lancer un projet qui s'intitule "Confin'art" ; le titre est sans équivoque, mais pouvez-vous nous en dire plus et en quoi consiste-t-il ? Durant cette première période, j'ai, en effet, lancé un projet personnel intitulé "Confin'art" (Hacharat'art), qui est, bien entendu, en rapport avec ce virus qui perturbe toute l'humanité. Le concept est que chaque artiste participant travaille de chez lui dans son atelier ou son domicile, et toutes les œuvres, soit des peintures sur toile et notamment des dessins, font partie d'une série visible sur mon compte facebook. En outre, j'ai également monté un projet d'exposition-vente virtuelle au profit des nécessiteux et du personnel médical. Pour l'instant, le site se construit, mais en attendant j'ai plus de 35 artistes qui ont offert des œuvres, entre professionnels, amateurs et autodidactes, et déjà il y a eu des ventes avant même le lancement ; c'est dire la grande générosité et la solidarité des Algériens. Cette pandémie et son impact sur l'humanité ont-ils changé votre conception de l'art, de la vie ou même votre approche de la peinture ? Cette pandémie a effectivement beaucoup changé notre (et ma) façon de voir, ma conception de l'art et de la vie, toute l'approche sociale et artistique va changer du tout au tout. Les valeurs de rapprochement seront plus intenses, plus vraies, plus justes. De futurs projets artistiques pour l'après-pandémie ? Oui, beaucoup de projets, d'expositions individuelles. Une était même prévue pour ce mois de mai, elle a bien sûr été reportée. Une dixième exposition est prévue pour le mois de novembre, un projet collectif au nord du Maroc pour fin septembre ; une exposition dans deux villes américaines entre la fin de cette année et le début de l'année prochaine ; un mégaprojet sur 4 villes algériennes avec des artistes performeurs et installateurs qui s'intitule le PAPA (Passerelle d'art plastique alternatif), c'est-à-dire une autre façon de voir une exposition et les lieux de diffusion. Je n'en dis pas plus, je reviendrai sur ce projet ; et bien sûr, 3 ou 4 workshops avec de jeunes créateurs à Oran, à Alger à la villa Abdeltif, toujours dans un cadre pédagogique quant aux techniques et médiums artistiques.