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"L'OMS ne peut pas se substituer aux états"
Pr mohamed Belhocine, membre du Comité scientifique de suivi de la pandémie Covid-19
Publié dans Liberté le 02 - 05 - 2020

Ancien responsable du bureau régional de l'Organisation mondiale de la santé au Nigeria et en Tanzanie, le Pr Mohamed Belhocine, qu'on surnomme "Monsieur Ebola", revient dans cet entretien sur la gestion de la pandémie de corona et les difficultés financières de l'OMS, notamment après la suspension de l'aide américaine.
Liberté : En tant qu'ancien délégué de l'OMS en Afrique, pensez-vous que l'organisation, qui a été fortement critiquée dans le monde, a fait preuve de suffisamment d'anticipation pour gérer et faire face à la pandémie de Covid-19 ?
Pr Mohamed Belhocine : C'est toujours très difficile de juger a posteriori une institution internationale de la trempe de l'Organisation mondiale de la santé. L'OMS a, par définition, un rôle normatif en matière de santé publique, soit dans les pays développés ou dans les pays sous-développés. Et, parfois, il n'est pas du tout facile de déclarer cette norme quand les critères ne sont pas clairs, parce que vous pouvez décréter une norme qui aura des conséquences catastrophiques sur la vie économique et sociale.
Dans le cas où vous déclareriez une pandémie un peu trop tôt, cela supposera l'arrêt de tous les moyens de transport, de toute activité. Ce n'est pas aussi facile. Est-ce que les critères ont-ils été établis au bon moment ou avec un peu de décalage ? Parfois, ces critères n'existent même pas parce qu'on est face à une situation exceptionnelle, nouvelle pour tout le monde. Quand on est dans une situation totalement nouvelle, il y a ce qu'on appelle les managers avec le retour au degré zéro d'excellence.
Qu'entendez-vous par degré zéro d'excellence ?
Quand on est devant une situation s anitaire nouvelle, tout le monde redevient ignorant, si je puis me permettre de le dire en un langage simple. Autrement dit, l'expert de l'OMS est aussi ignorant que vous et moi. La différence est que l'expert de l'OMS est un virologue, ou un épidémiologiste, ou un spécialiste des urgences.
Cela signifie qu'il va progresser plus vite, il va aussi faire travailler sa tête par rapport aux expériences précédentes qui ressemblent à celle-là, à l'image des expériences de la grippe aviaire ou porcine. C'est dire qu'une institution du système des Nations unies comme l'OMS n'est pas aussi figée. L'OMS a appris des épidémies précédentes. Elle a beaucoup appris de l'épidémie d'Ebola.
À ce titre, je vous rappelle l'expérience de l'avant-dernière épidémie d'Ebola à laquelle j'ai eu le privilège et l'honneur de contribuer à la lutte. Cette épidémie se déclarait pour la première fois dans des centres urbains avec une forte densité de population et une forte promiscuité, et donc avec un bilan catastrophique en termes de décès et en termes du nombre de cas. D'un côté, on a beaucoup critiqué l'OMS. Mais de l'autre côté, elle a énormément fait.
L'Organisation a dû s'ajuster très rapidement et apprendre de ces épidémies. Après quoi sont nés tous les concepts d'urgence sanitaire à caractère international. Ce concept est donc relativement récent. Sa critériologie est en mouvement. C'est facile de dire que l'OMS a réagi trop vite ou qu'elle n'a pas agi trop vite. Il n'y pas de critères absolus dans les deux cas de figure.
L'on comprend de votre développement que l'OMS a agi dans les délais et qu'elle est bien dans son rôle...
De mon point de vue, l'OMS est tout à fait dans son rôle. Elle a signalé très vite ce qui se passait. Il faut savoir que l'Organisation mondiale de la santé ne peut pas remplacer les pays du monde. La plupart des pays sont liés à l'organisation par un accord de base de coopération, notamment au sujet des urgences.
Ces pays sont signataires du règlement sanitaire international. Et tout pays signataire de ce règlement sanitaire est tenu de rapporter à l'OMS tout incident de santé mineur ou majeur jugé important et qui peut avoir des développements épidémiques plus tard, que ce soit dans votre propre pays ou dans des pays voisins.
Cependant, cette obligation peut être exécutée avec du sérieux ou avec plus ou moins de zèle. C'est pour vous dire que l'OMS n'a pas aussi toutes les cartes en main et tout le temps pour pouvoir juger. Si un pays ne déclare pas, à titre d'illustration, l'apparition d'une épidémie de choléra, l'OMS peut le savoir, mais pas d'une manière officielle.
Au regard de l'étendue et de la gravité des dégâts causés par le Covid-19 dans le monde, partagez-vous l'avis que la Chine, d'où a démarré ce Covid-19, ait eu à déclarer un peu en retard cette épidémie de nouveau coronavirus ?
C'est difficile de dire oui. Des experts ont dit que les Chinois ont déclaré le début de l'épidémie à une certaine date, alors qu'ils auraient dû le faire un peu avant. Mais vous n'allez pas à chaque fois que vous avez un incident de santé alerter le monde entier. Donc, l'on doit comprendre aussi ces pays.
C'est dire toute la difficulté de juger au début d'un incident de santé. Est-ce qu'on est en train de se diriger vers une catastrophe mondiale, ou c'est juste un incident de santé ? La majorité des incidents de santé sont des incidents localisés, heureusement pour l'humanité, malheureusement pour ceux qui sont touchés.
Les pays ont aussi une certaine retenue à ne pas alerter tout le monde parce qu'ils ont juste quelques cas de fièvre en foyers quelque part, ils envoient leurs épidémiologistes, qui feront le point. Ils concluent ainsi que c'est une petite épidémie de typhoïde ou de choléra, ils vont la traiter, ils vont faire la déclaration à l'OMS.
Que pensez-vous des thèses "complotistes" nées des accusations formulées par Washington, Londres et Paris contre le laboratoire chinois de Wuhan, d'où est sorti le virus Covid-19 ?
En tant que scientifique que je suis, je reste très prudent sur les thèses "complotistes". Il n'existe aucun argument scientifique très sérieux pour appuyer cette thèse. De mon point de vue et sur la base de ce que je sais, de ce que je lis et des connaissances scientifiques acquises, je pense que ce sont des thèses qui ne tiennent pas la route.
Les USA ont beaucoup critiqué l'OMS, au point d'annoncer la suspension de leurs cotisations...
En fait, une décision pareille est une décision malheureuse. Elle vient d'un pays qui a traditionnellement et longtemps financé de façon conséquente l'OMS. À ce titre, il faudra d'abord comprendre que l'Organisation fonctionne comme une coopérative des Etats membres.
Elle se distingue par un fonctionnement interne qui est du reste différent d'un certain nombre d'autres organisations onusiennes internationales. Je cite l'exemple des Fonds comme l'Unicef ou le Fonds des Nations unies pour la population, UNFPA. Ces derniers ne fonctionnent pas de la même manière que l'OMS, l'Unesco ou la FAO. L'Organisation mondiale de la santé fonctionne sur le mode d'un DG élu par les Etats membres.
Alors que les directeurs exécutifs des Fonds sont plutôt désignés par le SG de l'ONU. La cotisation à l'OMS est calculée sur la base des capacités financières du pays membres et sur la base de la population. Par conséquent, un grand pays riche cotisera plus qu'un petit pays pauvre.
L'apport financier des Etats-Unis dans cette "coopérative" onusienne est-il important ?
Tout à fait, les USA restent un grand cotisant d'un côté et un grand donateur de l'autre. L'OMS fonctionne comme une coopérative. Chaque pays membre cotise selon vos capacités, mais il utilise l'Organisation selon vos besoins. Autrement dit, les plus riches donnent plus, les plus pauvres donnent moins, mais les plus riches reçoivent peu ou pas, les plus pauvres reçoivent plus de l'OMS.
La suspension des USA de ses cotisations va-t-elle peser sur le budget du fonctionnement de l'Organisation mondiale de la santé ?
Certainement. Il faut savoir d'ailleurs que le budget de l'Organisation ne fait que se rétrécir depuis de très nombreuses années, alors que les besoins en termes de prise en charge des problématiques liées à la santé publique dans le monde en développement sont devenus plus complexes.
La prise en charge des épidémies qui sont toujours là telles le VIH/sida ou les maladies ré-émergentes comme la tuberculose. L'OMS doit aussi aider à faire face aux maladies non transmissibles. Y faire face avec moins de ressources devient plus difficile.
Par rapport à la mesure de confinement adoptée dans beaucoup de pays frappés par l'épidémie, l'OMS a rappelé qu'elle n'a pas instruit les pays à généraliser le confinement comme stratégie de riposte, et libre à chaque pays d'adopter la stratégie qui lui convient...
L'OMS n'instruit pas. Mais elle essaye de donner des normes basées sur des connaissances scientifiques et techniques dans le domaine de la santé. Néanmoins, il est crucial de savoir que le confinement général de la population n'est pas une action de santé publique.
C'est une action politique prise par un gouvernement pour faire face à une problématique. Décréter la mesure de confinement ou de déconfinement n'est pas du ressort de l'Organisation.
L'OMS préfère parler de distanciation physique ou du port du masque, vacciner ou ne pas vacciner. En un mot, le confinement d'une population est une décision beaucoup plus politique que technique.
En tant que scientifique, comment évaluez-vous la riposte du gouvernement algérien contre le Covid-19 ?
À préciser que lorsque le gouvernement a décrété la mesure de confinement, je n'avais pas encore rejoint le comité scientifique, je pense honnêtement que les décisions de confinement ont été prises suffisamment à temps.
Et de la généralisation de la chloroquine ?
Malgré toutes les polémiques nées autour d'elle, la chloroquine a été utilisée en milieu hospitalier. J'estime que quand vous êtes devant une situation de maladie nouvelle pour laquelle vous n'avez ni vaccin, ni antidote chimique et que vous avez un médicament probable, on n'a pas le droit de ne pas l'essayer, car il y a l'espoir de donner une chance au malade de guérir.
Comment jugez-vous les résultats obtenus jusque-là ?
En tous les cas, le sentiment des praticiens par rapport à l'utilisation de la chloroquine est positif. Maintenant, il faut interroger les chiffres et les résultats des études en détails.
Le gouvernement a dernièrement assoupli le dispositif de mise en quarantaine pour la wilaya de Blida. Pensez-vous que le déconfinement qui fait à présent l'objet d'un débat à l'échelle planétaire doit être accompagné d'un nombre de mesures, entre autres le port du masque ?
Le déconfinement ne doit pas seulement être accompagné du port de masque. Il y a aussi les enquêtes épidémiologiques qu'il faut renforcer. Les équipes épidémiologiques doivent confiner et surveiller tous les contacts d'un cas nouvellement notifié et ce, pendant 14 jours.
En fait, les sujets contacts risquent de devenir pour leur part des distributeurs de virus dans la communauté. Par définition, on déclenche une enquête autour de tous les contacts dès l'apparition d'un cas. Un cas confirmé suggère en général entre 15 et 20 contacts à isoler et surveiller. Autrement dit, il faut développer le confinement ciblé au lieu de confiner toute la population.

Entretien réalisé par : Hanafi HATTOU


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