Le chancelier, Gerhard Schröder, et sa rivale conservatrice, Angela Merkel, sont engagés dans un duel sans merci pour gouverner l'Allemagne, aucun camp n'ayant obtenu dimanche la majorité absolue aux élections législatives anticipées. Alors qu'une Angela Merkel, nerveuse, affirmait, lundi matin, que sa formation, la CDU/CSU, formait “le plus gros groupe parlementaire et avait une mission gouvernementale claire”, un chancelier social-démocrate très pugnace, acclamé par un millier de partisans, revendiquait le “succès” obtenu par son camp social-démocrate et Vert. Comme prévu, le président du SPD, Franz Müntefering, a invité les dirigeants de la CDU/CSU, du FDP et des Verts à des discussions exploratoires dès cette semaine. Trois conditions doivent être réunies pour que les négociations aboutissent, a-t-il martelé : que le SPD gouverne, que Gerhard Schröder reste chancelier et que le programme du SPD soit le plus possible poursuivi. La direction du FDP a rétorqué qu'elle excluait ne serait-ce que des pourparlers avec le SPD. De son côté, la CDU/CSU a aussi lancé ses invitations aux autres partis pour la formation d'une coalition sous la houlette d'Angela Merkel. Plusieurs de ses dirigeants ont, en outre, tendu la perche aux Verts pour qu'ils rejoignent une coalition CDU-CSU/FDP. Le président du Parti libéral, Guido Westerwelle, n'a pas exclu, lui non plus, un accord avec les Verts. “Nous devons exploiter toutes les chances pour permettre un gouvernement vert-noir en Allemagne”, a-t-il dit. Cette configuration d'une coalition entre conservateurs, libéraux d'un côté et Verts de l'autre paraissant pourtant très invraisemblable. Le chef de file des Verts, Joschka Fischer, a rejeté cette offre en s'en moquant et en prédisant que la candidate chrétienne-démocrate originaire de l'ex-RDA, faute de majorité, ne serait pas chancelière. La recherche de combinaisons quasi impossibles s'explique, pour les deux camps, par la concurrence entre Schröder et Merkel qui hypothèque actuellement la formation d'une grande coalition entre SPD et CDU/CSU, option pourtant la plus viable et la plus logique. Aujourd'hui, c'est la paralysie politique qui menace désormais le pays, en crise économique et sociale, et qui a un urgent besoin de réformes. Loin de la mise en place rapide d'un gouvernement efficace assuré d'une majorité stable, c'est une crise gouvernementale d'une durée incertaine, qui semble s'annoncer dans ce pays, clé de l'Union européenne, souvent qualifié “d'homme malade de l'Europe”. Pour la première fois depuis 1949, ces deux grands partis sont tombés ensemble sous la barre des 70% des suffrages, et aucun camp —chrétien-démocrate/libéral d'un côté, social-démocrate/Verts de l'autre — ne dispose d'une majorité absolue des sièges au Bundestag.