Les frères Kouninef sont notamment poursuivis pour "trafic d'influence, blanchiment d'argent, obtention d'avantages indus, détournement de foncier et de concessions et non-respect des engagements contractuels dans la réalisation de projets publics. Après plusieurs semaines de délibérations, le tribunal de Sidi M'hamed a rendu les verdicts dans le procès des frères Kouninef. La fratrie écope de peines allant de 12 à 20 ans de prison, assorties de fortes amendes et de saisies de tous leurs biens en Algérie et à l'étranger. Le tribunal de Sidi M'hamed a ainsi condamné, hier, Réda Kouninef, le patron du groupe KouGC, le plus connu des frères, à 16 ans de prison ferme. Ses frères, Tarek-Noah et Abdelkader-Karim, ont été condamnés respectivement à 15 ans et 12 ans de détention. Leur sœur, Souad, en fuite, a été condamnée, quant à elle, à une peine de 20 ans de prison. Un mandat d'arrêt international est lancé contre elle. Mais l'affaire n'est pas pour autant gagnée puisqu'elle dispose également de la nationalité suisse. La justice a également condamné les trois frères et la sœur à des amendes de 8 millions de dinars chacun et ordonné la saisie de tous leurs biens, ici en Algérie et à l'étranger. Le gérant de la société KouGC, Keddour Ben Tahar, écope, lui, d'une peine de 8 ans de prison. Les autres personnes impliquées dans l'affaire, essentiellement des cadres des ministères de l'Industrie, de l'Agriculture, des Ressources en eau, de l'Energie et des Télécommunications, ainsi que d'autres secteurs où le groupe KouGC a obtenu des marchés, ont été condamnées à des peines allant de 18 mois à 3 ans de prison ferme et des amendes allant de 200 000 à un million de dinars, rapporte l'APS. Les avocats ont décidé de faire appel. Le procès des frères Kouninef s'est déroulé du 9 au 14 septembre. Ils sont notamment poursuivis pour "trafic d'influence, blanchiment d'argent, obtention d'avantages indus, détournement de foncier et de concessions et non-respect des engagements contractuels dans la réalisation de projets publics". Lors du procès, l'un des plus couverts par les médias, les Algériens ont découvert l'étendue de l'influence de la famille Kouninef qui, tout en étant l'une des plus proches des Bouteflika, a toujours agi dans la discrétion. Des projets publics dans des secteurs aussi stratégiques que le transfert d'eau des barrages, la construction d'infrastructures publiques, les chemins de fer ; rien n'a échappé aux multiples entreprises des frères Kouninef. Les sommes engrangées sont astronomiques, et durant les 20 ans de règne des Bouteflika, les entreprises de l'homme d'affaires Ahmed Kouninef, décédé d'un arrêt cardiaque en 2005, n'ont jamais manqué de commandes. Il suffisait de soumissionner dans un projet pour que toutes les autres entreprises soient disqualifiées. Proximité avec Saïd Bouteflika En plus des marchés obtenus dans des conditions souvent douteuses, les Kouninef ont étendu leur influence à d'autres secteurs. Grâce à sa proximité avec Saïd Bouteflika, la famille a pris le contrôle d'entreprises publiques, acquises dans des conditions discutables. C'est le cas de la Société des corps gras d'Alger (Cogral) et des concessions dans les ports d'Alger et d'Oran. Cette entreprise, qui produit notamment de l'huile de table, se trouve, depuis des années, en difficulté. La proximité de cette famille avec le pouvoir a poussé parfois vers l'irréel. En 2004, cette société, qui n'était pas encore connue du grand public, avait entamé l'installation de cabines téléphoniques, Oria, dans une bonne partie du territoire national. Au moment où le téléphone mobile a commencé à se démocratiser, les autorités ont trouvé le moyen d'accorder ce qui semble être un cadeau aux Kouninef. Le projet s'est arrêté. Mais bizarrement, c'est Algérie Télécom qui paiera la facture. "Nous avons respecté le cahier des charges, mais Algérie Télécom n'a pas voulu respecter le sien. Nous avons perdu beaucoup d'argent. Nous avons saisi le tribunal qui nous a donné raison et décidé d'un dédommagement de 2,81 milliards de dinars, alors que nous avions réclamé, sur la base d'une expertise, la somme de 4 milliards de dinars", a indiqué Réda Kouninef au juge. Mais il y a pire : les Kouninef ont utilisé de l'argent du Fonds national d'investissement (FNI) pour contribuer au financement de la campagne électorale d'Abdelaziz Bouteflika en 2014. "Le FNI nous a viré le montant de certaines prestations dans le compte du groupement, lequel a viré la somme aux sociétés ; j'ai demandé un prêt de 200 millions de dinars et mon frère en a fait autant, pour le même montant, et nous avons fait un chèque de 400 millions de dinars au nom de la direction de la campagne électorale", avoue Réda Kouninef devant le juge. Malgré cela, les frères Kouninef ont nié avoir utilisé leur proximité avec Saïd Bouteflika pour s'enrichir !