Le spectre de l'aggravation de l'insécurité alimentaire plane sur l'Afrique, en raison des effets de la pandémie de coronavirus et de la persistance des conflits armés, a alerté jeudi le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) dans un communiqué transmis aux médias à l'occasion de la Journée mondiale de l'alimentation. "En Afrique, la flambée des prix des denrées alimentaires et les pertes d'emploi engendrées par la pandémie de Covid-19 font craindre une augmentation de l'insécurité alimentaire et de la malnutrition dans les communautés à faible revenu, en particulier dans les régions en proie à un conflit interminable qui réduit l'accès des populations aux marchés et aux terres agricoles", indique le communiqué du CICR, se basant sur une enquête menée dans une dizaine de pays d'Afrique. "Le risque – à mesure que les prix des denrées alimentaires flambent et que les revenus chutent – est de voir la malnutrition augmenter, parce que les familles n'ont pas les moyens d'acheter suffisamment de nourriture ou que les seuls aliments qu'elles peuvent se procurer sont moins riches en éléments nutritifs", explique Pablo Lozano, analyste en sécurité économique pour l'Afrique au CICR. "Il ressort très nettement de notre enquête que dans les communautés auprès desquelles nous travaillons les gens sont en difficulté financière. Cela est particulièrement vrai chez les personnes qui avaient recours au travail journalier, les propriétaires de petites entreprises, ainsi que les communautés qui étaient déjà aux prises avec l'insécurité alimentaire à cause d'un conflit ou d'une situation de violence", expliquent encore les auteurs de cette enquête qui ont travaillé en Mauritanie, au Niger, au Nigeria, au Cameroun, en Libye, au Soudan, en Ethiopie, au Kenya, en Somalie et en République démocratique du Congo. Mais c'est surtout dans les pays en conflit, comme la Somalie, le Nigeria et le Burkina Faso, que la situation se dégrade, les conditions sanitaires et les effets de la pandémie de coronavirus ayant entraîné une forte augmentation du chômage, en plus de l'insécurité. "Au Burkina Faso, où la violence s'est intensifiée sur fond de pandémie, on estime aujourd'hui que près de 2,8 millions de personnes sont confrontées à des niveaux d'insécurité alimentaire critiques ou pires, ce qui représente une augmentation de plus de 200% par rapport à la même période l'an dernier", note l'enquête du CICR, évoquant aussi la situation qui frise le chaos au Tchad, mais pour des raisons liées, entre autres, au changement climatique (sécheresse et inondations surtout). "Dans la région du lac Tchad, on estime que 65% des familles vivent avec seulement deux dollars par jour", estime le CICR. "Les inondations sont venues augmenter les niveaux élevés d'insécurité alimentaire et de malnutrition au Soudan du Sud, où il est estimé que plus de la moitié des 11 millions d'habitants se trouvent dans une situation d'insécurité alimentaire sévère", alerte cette institution humanitaire.