Le président de la république, Abdelaziz Bouteflika, a été catégorique : les dirigeants de l'ex-FIS ne reviendront plus sur la scène politique. Animant son onzième meeting de campagne en faveur de “la charte pour la paix et la réconciliation nationale” au stade du 18-Février, Bouteflika a soutenu : “Aux frères dirigeants du parti dissous qui se sont dit lésés dans leurs droits, je dirai que le peuple algérien n'a pas pardonné ni oublié ce qui s'est passé pendant 15 ans. Il est tout à fait clair que ceux qui ont mis le feu au pays ne peuvent en aucun cas revenir sur la scène politique. Ils peuvent toutefois regagner le pays.” Et d'enchaîner : “On ne les a pas lésés. Il est du devoir de chaque Algérienne et Algérien de payer un tribut à la réconciliation nationale.” Pour lui, l'essentiel de la crise vécue par le pays trouve ses origines dans la “démocratie anarchique” instaurée après les évènements d'Octobre 1988. Il estime que le peu de cas fait des affaires de l'état a encouragé certains à verser dans la violence. S'il a tancé les islamistes pour avoir instrumentalisé la religion et recouru à la violence, il n'a pas manqué de reprocher aux démocrates d'avoir, eux aussi, “jeté de l'huile sur le feu”. “Les démocrates sont, eux également, tombés dans le piège. Certes, ils ont combattu la violence des couteaux, du pistolet et des bombes. Mais ils l'ont combattue avec des mots blessants en ‘mangeant la viande' de leurs frères. Eux aussi, ont allumé le feu du terrorisme, ils ont jeté de l'huile sur le feu”. Et de clamer : “On ne veut ni d'un état islamique théocratique ni d'un état laïque. La Constitution stipule clairement que l'Islam est la religion de l'état.” L'ANP et “la tomate pourrie” Tout en rendant un vibrant hommage à l'ANP et aux services de sécurité, Abdelaziz Bouteflika a surpris son monde en lâchant de manière sibylline : “Ce n'est pas parce qu'il y a une tomate pourrie dans une corbeille qu'il faut jeter toute la corbeille.” Ce qui veut dire que l'Armée algérienne compte bien des pourris dans ses rangs. Qui sont-ils ? Les généraux, pour être bien en phase avec les chantres de la réconciliation nationale, qui ont de tout temps accusé les dirigeants de l'Armée algérienne de tous les maux (massacres collectifs, corruption,…) ? Bouteflika ne le précise pas. Pour la première fois depuis sa réélection à la tête de l'état, Abdelaziz Bouteflika a décoché des fléchettes à l'adresse de ses rivaux lors de l'élection présidentielle du 8 avril 2004. “Ce peuple est bon et intelligent. Il a su faire la différence entre celui qui travaille et ceux qui ne font que parler (yzemer bel ghitta)”. À ces derniers il a dit : “rentrez chez vous.” Et celui qui travaille, il l'a encouragé. “Je ne suis pas un prophète, mais votre serviteur.” Une autre critique est lancée contre ceux qui n'ont cessé de porter atteinte à l'image du pays. “Des voix se sont employées, avant et après l'indépendance, à ternir l'image et la réputation de l'Algérie. Ce n'est pas grave car c'est la démocratie. Ils sont libres. Mais ils ont leur religion et nous avons la nôtre. Notre religion à nous, c'est l'Algérie avant tout”, a-t-il soutenu. Parlant de réconciliation nationale, il s'est écrié : “Je suis l'homme de la réconciliation et de la paix. Je suis de ceux qui pardonnent. 15 ans barakat !” Laghouat étant le bastion de la zaouïa Tidjania, Bouteflika n'a pas manqué de rendre hommage à son fondateur et d'encenser les zaouïas en les qualifiant de “foyers du djihad”. “Je dois vous dire que je suis de ceux qui défendent et encouragent les confréries pour enseigner l'Islam.” Il a aussi porté au pinacle l'hospitalité des gens de Laghouat et la beauté de ses femmes. Les citoyens de Ghardaïa, d'El-Bayadh et de Djelfa, venus nombreux écouter le président de la république, ont dû puiser dans la patience légendaire des gens du sud pour ne pas laisser exploser leur colère. A. C.