Entre Alger et Bruxelles, les relations connaissent une zone de turbulences. La teneur du communiqué de l'UE à l'issue de la réunion du Conseil d'association d'avant-hier atteste des divergences entre les deux parties sur les questions des droits de l'Homme et de la coopération économique. L'Union européenne (UE) a insisté, hier, sur la nécessité de garder un cadre de partenariat en parfaite conformité aux clauses prévues à travers l'accord d'association engagé en 2005 avec l'Algérie. Dans un communiqué rendu public, hier, à l'issue de la 12e session du Conseil d'association Union européenne-Algérie, l'UE a ainsi signifié qu'"il est important que les échanges commerciaux se fassent dans le respect de l'accord d'association". La Commission européenne, ajoute le communiqué, "a transmis récemment une proposition visant à résoudre le différend en la matière et l'UE espère trouver très prochainement un accord dans le cadre de l'article 100 de l'accord d'association". De son côté, le ministre des Affaires étrangères, Sabri Boukadoum, a précisé qu'"en tant que négociateurs algériens, nous sommes assez conscients des manquements en matière de l'application de l'accord d'association, notamment dans son aspect commercial". L'essentiel, a-t-il ajouté, "est qu'il y a une volonté de dialogue de part et d'autre, et il est évident que quand il y a déséquilibre, nous intervenons pour le corriger". Le ministre a fait savoir, à ce propos, que le "message de l'Algérie est bien reçu par la partie européenne". Le chef de la diplomatie algérienne a rappelé que "l'Algérie est la porte de l'Afrique, un facteur de stabilité dans la région et un marché de 45 millions d'habitants". Sabri Boukadoum reconnaît que "l'accord est aussi vital pour l'Algérie, particulièrement en termes d'investissement". Pour sa part, le ministre délégué chargé du Commerce extérieur, Aïssa Bekaï, a indiqué que "les concertations entre l'Algérie et l'Union européenne se poursuivaient toujours dans le but d'évaluer l'accord". Les premières discussions à ce sujet se sont déroulées au mois de septembre dernier. D'autres concertations techniques ont eu lieu, lundi, où ledit accord a été passé en revue. L'objectif est d'arriver à un accord sur les données commerciales, précise Aïssa Bekaï, tout en expliquant que l'Algérie et l'UE ont fait, chacune de son côté, leur propre évaluation de ce document. L'Algérie, pour rappel, avait émis des réserves en 2014 dans le but de rééquilibrer la balance commerciale qui était en défaveur de notre pays. L'accord, faut-il le rappeler, a été signé dans la précipitation en 2002 et est entré en vigueur en 2005 sur insistance de l'ancien président qui a voulu coûte que coûte concrétiser ce partenariat. Et les conséquences négatives de cet empressement sont aujourd'hui réelles sur le terrain. L'accord stipule, dans son volet commercial, l'instauration d'une Zone de libre-échange et la libération progressive des produits agricoles et agroalimentaires et les produits halieutiques. Le document prévoyait, pour cela, une période de transition de 12 ans, jusqu'en 2017, afin que l'Algérie élimine progressivement ses droits de douane sur des produits industriels et qu'elle applique une libéralisation sélective des produits agricoles. Cette période a, par la suite, été prolongée de trois ans, jusqu'au 1er septembre 2020, pour certains produits, comme l'acier, les textiles, les produits électroniques et l'automobile. L'application de cet accord consistera en un démantèlement intégral des droits de douane. Or, si le démantèlement tarifaire total prévu par cet accord venait à être appliqué, il aura des effets désastreux sur une économie algérienne déjà fortement fragilisée. Déséquilibre des échanges En tout cas, Alger n'a jamais caché son insatisfaction par rapport à la mise en œuvre de cet accord depuis 2005. Les résultats enregistrés depuis l'entrée en vigueur de l'accord sont jugés par l'ensemble des économistes en deçà des attentes, voire décevantes. L'arrivée en masse des investissements directs étrangers (IDE), tel qu'attendu à la faveur de cet accord, n'a pas eu lieu. La balance commerciale de l'Algérie avec son partenaire européen a toujours été favorable à la rive nord de la Méditerranée. Le déséquilibre des échanges est flagrant. En 11 ans, l'Algérie a importé pour plus de 250 milliards de dollars et n'a exporté vers l'Europe que pour moins de 14 milliards de dollars en produits hors hydrocarbures. En février dernier, lors d'un atelier d'évaluation de l'accord, les chiffres présentés par le ministère du Commerce montraient que les importations de l'Algérie avoisinaient, avant l'entrée en vigueur de ce partenariat, les 9 milliards de dollars en 2003, contre 21 milliards de dollars d'importations depuis l'UE en 2018. Le faible niveau des exportations vers les marchés européens est dû, entre autres raisons, à l'absence de préparation et d'accompagnement des entreprises algériennes productrices pour faire face à la concurrence.