Pays parmi les plus pauvres du monde, miné par des attaques jihadistes, le Niger va réaliser au terme de l'élection présidentielle la première transition démocratique pacifique de son histoire, Mahamadou Issoufou quittant le pouvoir après ses deux mandats constitutionnels. Ce pays sahélien à l'histoire marquée par de nombreux coups d'Etat n'a jamais vu deux présidents élus se succéder depuis l'indépendance en 1960. "Passer le pouvoir en 2021 à un successeur démocratiquement élu (...) sera ma plus belle réalisation, ce sera une première dans l'histoire de notre pays", a souligné M. Issoufou dont le retrait a été unanimement salué sur la scène internationale alors que de nombreux chefs d'Etat africains s'accrochent au pouvoir. L'activiste Moussa Tchangari est toutefois sceptique. "Le retrait de M. Issoufou est simplement le respect de la norme, il y a d'autres normes à respecter pour être démocratique : les libertés et les droits ne sont pas respectés. Nous, activistes, nous avons fait des séjours en prison et les manifestations sont souvent interdites. Le Niger est une ‘démocrature'". Deux attaques meurtrières, une à l'Ouest (7 soldats tués le 21 décembre) où sévit régulièrement l'autoproclamé Etat islamique au Grand Sahara (EIGS) et une à l'Est revendiquée par Boko Haram (34 morts le 12 décembre) se sont produites à l'approche du scrutin, rappelant l'importance de la question sécuritaire. Trente candidats se disputeront les suffrages des quelque 7,4 millions d'électeurs, sur environ 23 millions d'habitants. Le grand favori est Mohamed Bazoum (60 ans), ancien ministre de l'Intérieur et des Affaires étrangères, considéré comme le bras droit du président Issoufou et comme plus puissant que le Premier ministre. Il vise une victoire dès le premier tour, ce qui n'est jamais arrivé dans l'histoire du pays. Même le président Issoufou ou le très populaire Mamadou Tandja, décédé récemment, avaient dû attendre le second tour pour l'emporter lors de leurs réélections triomphales. Fort de l'écrasante victoire de son parti aux élections locales du 13 décembre, cet homme de 60 ans, qui bénéficie de la machine électorale de son parti et de l'Etat, se place "dans les traces d'Issoufou" et a promis de mettre l'accent sur l'éducation, notamment pour les jeunes filles, ainsi que sur la sécurité.