Liberté : Quel est le profil type de l'homme violent envers son épouse ou une parente proche ? Dr Mouhoub : Il n'y a pas un profil psychologique type de l'homme violent. Il n'y a pas de ressemblances caractéristiques entre les cas. Des pulsions violentes peuvent habiter chacun de nous. Pour définir le profil au cas par cas, il faudrait comprendre la problématique, chercher à savoir si l'agresseur souffre de troubles de la personnalité, s'il est schizophrène. Au moment de l'acte, était-il sain mentalement ? Est-ce que la personne doit être prise en charge, parce qu'elle constitue un cas de violence pathogène et qu'elle représente un danger pour la famille et pour la société ? Le féminicide est annoncé par des signaux. Il est précédé par des agressions et des menaces, qui prennent peu à peu de l'ampleur. Le cycle de la violence s'installe progressivement. Les études démontrent que derrière les statistiques sur les féminicides se cache un phénomène social qui va au-delà des problèmes de couples classiques. Les violences conjugales, pas forcément physiques puisqu'elles peuvent être psychologiques et sexuelles, et plus généralement la violence au sein de la société, sont encore considérées comme des tabous, dont on ne parle pas beaucoup dans les médias. Même les victimes ne s'expriment pas sur leurs souffrances. Elles sont empêchées, souvent, de parler. Les victimes de violences conjugales sont issues de milieux sociaux et intellectuels différents. Pourquoi se soumettent-elles justement au harcèlement moral et à l'agression physique ? Chaque cas est différent. L'agresseur manifeste des épisodes de colère, profère des menaces, violente l'autre verbalement et physiquement. Généralement, la victime patiente dans l'espoir que l'agresseur change de comportement. Le conflit commence généralement par des tensions. La victime s'inquiète, tente d'améliorer la relation avec son agresseur, en faisant attention à ses gestes et son comportement, essaie de trouver des solutions et avancer. Elle souffre, néanmoins, de troubles multiples : insomnies, problèmes de concentration, anxiété, troubles alimentaires... La question qui se pose est la suivante : pourquoi la victime ne se confie-t-elle pas dès la première dispute, la première agression ? Je dirais qu'elle pense toujours avoir des sentiments amoureux pour son conjoint, qu'elle espère qu'il change de comportement, qu'elle a peur de déraciner ses enfants de leur milieu familial, alors qu'ils ne sont pas épargnés parfois par les violences, et qu'elle craint surtout le statut de femme divorcée. Propos recueillis par : Souhila H.