Au bout de plus de 12 heures de procès, le jeune étudiant Walid Nekkiche a retrouvé la liberté. Condamné à six mois de pison ferme et une amende de 20 000 DA, il a quitté la prison d'El-Harrach, où il a passé 14 mois de détention provisoire. Mais son procès restera dans les annales. A sa sortie de prison, Walid Nekkiche, accompagné de Kamel Bensaâd, acquitté par la cour, a été accueilli par des youyous et des applaudissements. Comme tous les détenus d'opinion qui quittent la prison, il a été porté sur les épaules. C'est vers une heure du matin de mardi que le juré, composé de trois magistrats et quatre citoyens assermentés, s'est retiré pour délibérer après des heures d'une bataille acharnée des avocats qui ont plaidé l'innocence de leur mandant. Le verdict a fait retomber la pression qui régnait tout au long la journée et une partie de la nuit de lundi dans la chambre criminelle qui a siégé au tribunal de Dar El-Beïda (Alger). De toutes les accusations, très graves, qui pesaient sur Walid Nekkiche, et qui pouvaient le mener à une réclusion très longue, une seule est retenue : "la publication de slogans susceptibles d'attenter à l'unité nationale". Pour cela, le jeune militant a été condamné à six mois de prison ferme, assortie d'une amende de 20 000 DA. On est loin de la peine à perpétuité requise plus tôt dans l'après-midi de lundi par le procureur de la République. Un réquisitoire dont la sévérité a résonné au-delà des murs du palais de justice de Dar El-Beïda, à tel point que le procès est devenu carrément le premier sujet de discussion sur les réseaux sociaux. S'ils admettent que même la peine de 6 mois est "déjà de trop", les avocats et les proches de Walid Nekkiche sont tout de même satisfaits. A cause notamment de la nuit et du couvre-feu, imposé dès 20h à Alger, beaucoup d'avocats qui ont terminé leurs plaidoiries et des journalistes avaient déjà quitté les lieux. Mais les rares qui ont veillé jusqu'à cette heure de la nuit n'ont pu cacher leur joie. C'était surtout le cas des deux parents du jeune étudiant qui ont vécu tout le procès sur les nerfs, eux, qui, comme l'ensemble de ceux qui ont suivi le procès, ont été assommés par le réquisitoire du procureur de la République. La sortie de prison ne signifie pas que "l'affaire Nekkiche" est définitivement close. Les révélations sur la torture que le jeune homme a subies lors de sa garde à vue, fin novembre 2019, ont éclipsé le procès en lui-même. Ses avocats ont décidé de déposer une nouvelle plainte pour "torture". Si la justice algérienne ne réagit pas, certains d'entre eux s'excluent pas de saisir les instances internationales, qui ont le pouvoir d'intervenir dans ce genre de situations. Et si les autorités n'ont toujours pas réagi à ces révélations, des organisations de défense des droits de l'Homme, des avocats, des personnalités politiques et de simples citoyens demandent que la lumière soit faite sur cette pratique. Le tribunal médiatique Le procès de Walid Nekkiche, qui a tenu en haleine une bonne partie de l'opinion publique, a révélé une nouvelle fois que la violation du principe de la présomption d'innocence est une pratique courante chez certains médias proches du pouvoir. Des journaux se sont contentés de répercuter l'arrêt de renvoi, dans sa partie qui accable le prévenu, sans attendre les plaidoiries. Pis, même les propos du concerné, qui a nié les accusations, ont tout été ignorés. Walid Nekkiche a été condamné dans les médias avant de l'être par la chambre criminelle. Pourtant, le jury l'a acquitté dans toutes les charges où il est notamment accusé de séparatisme ou de connivence avec des parties étrangères !