Tout en contribuant à combler les besoins de la population en eau, le parc national des stations de dessalement d'eau de mer s'avère extrêmement énergivore et sa gestion charrie des coûts économiques exorbitants. Avec le prolongement du stress hydrique qui sévit dans le pays, l'Etat prend une option claire en faveur du dessalement de l'eau de mer. Le ministre des Ressources en eau, Mustapha Kamel Mihoubi, a indiqué, lundi, que l'Etat entend doubler les capacités nationales de dessalement de l'eau de mer qui passeront de 561 millions de m3/an actuellement à 2 milliards de m3 annuellement à l'horizon 2024. L'Algérie, qui compte actuellement 11 grandes stations de dessalement d'eau de mer, "s'attelle à la réalisation de nouvelles stations dans les régions qui enregistrent un déficit en ressources en eau, pour élever les capacités de production à 2 milliards de m3 par an d'ici 2024", soutient le ministre qui souligne, dans la foulée, que les stations de dessalement de l'eau de mer sont une "solution durable" qui peuvent compenser tout déficit ou pénurie de ressources en eau de surface ou souterraine. L'eau dessalée contribue actuellement à hauteur de 17% à l'approvisionnement en eau potable. Le taux actuel de remplissage des barrages, tournant autour de 44% en moyenne nationale, et les difficultés de mobilisations des ressources aquifères remettent au centre des débats la question de la sécurité hydrique ; laquelle passe pour être l'un des grands défis auxquels est confronté le gouvernement. D'importants investissements ont été consentis ces 20 dernières années à travers la réalisation de plusieurs barrages — le pays en recense 75 actuellement — et 11 grandes stations de dessalement sans pour autant venir à bout des difficultés d'accès à l'eau potable. Bien que ces investissements aient contribué à multiplier par trois les capacités du pays de distribution d'eau potable, la sécurité hydrique du pays se lézarde davantage dans un contexte de croissance de la population, d'urbanisation, de hausse des températures, d'industrialisation et de développement du secteur agricole. Cependant, l'option prise en faveur du dessalement de l'eau de mer n'est pas sans conséquences sur la consommation nationale d'énergie, laquelle évolue de +10% en moyenne annuelle ces dernières années. Les stations de dessalement sont énergivores et l'électricité consommée provient essentiellement du gaz naturel. La facture salée des 11 usines de dessalement — exception faite des autres petites stations qui sont au nombre de 10 — est restée jusqu'ici un secret d'Etat, car remettant en cause la viabilité économique de ces usines. En plus des coûts d'acquisition, sujets à polémiques du temps où Chakib Khelil était à la tête du ministère de l'Energie, le fonctionnement de ces usines nécessite une grande quantité d'énergie électrique, produite essentiellement par le gaz naturel. Un rapport du groupe Sonelgaz, mettant sous les feux de la rampe les courbes de consommation de l'énergie électrique durant la période 2004-2014, fait ressortir une forte hausse de la consommation du segment "Haute tension" en raison, notamment, de l'activité des stations de dessalement. En plus de leur entretien et du coût de gestion, la subvention du prix de l'eau produite par les usines de dessalement coûte à l'Etat des dizaines de milliards de dinars annuellement. Plus de 90% du budget de fonctionnement du ministère de l'Energie est englouti dans les stations de dessalement de l'eau de mer, soit environ 60 milliards de dinars annuellement. En définitive, même si l'option du dessalement a contribué à améliorer l'approvisionnement en eau potable, elle s'est avérée énergivore et extrêmement coûteuse. Désormais, les défis et les choix qui s'offrent au gouvernement sont essentiellement politiques.