Les participants au colloque national intitulé "L'information à l'ère de la post-vérité, fake news et fact checking : qu'en est-il en la matière dans les médias algériens ?" ont plaidé, mercredi dernier, à l'Ecole nationale supérieure de journalisme et des sciences de l'information (ENSJSI), pour un modèle de fact checking propre aux médias algériens, au renforcement de la formation, l'introduction d'un module spécifique sur le fact checking, la création d'un consortium entre les médias, mais aussi la coopération avec des experts étrangers, pour s'inspirer d'un modèle adapté et d'une législation qui permettrait de contrôler l'avalanche des fake news qui inondent les autoroutes d'information, à commencer par les réseaux sociaux. Et si les carences institutionnelles ont été mises en exergue dans la lutte contre les fake news, en sus du chamboulement du paysage médiatique avec l'éclosion des sites et des blogs, il est évident, pour les intervenants, que l'Algérie devra prendre ses devants pour faire face à "la guerre des plateformes" qui submergent la Toile et qui, souvent, influe sur la pratique du métier de journaliste en Algérie. Pour le professeur et directeur de cette école, Abdesselam Benzaoui, l'Algérie doit s'inscrire dans cette dynamique, allant jusqu'à proposer un module sur le fact-checking à l'ENSJSI. Idem pour Belkacem Mostefaoui, directeur de Musc (Laboratoire Médias, usages sociaux et communication), qui estime que l'enjeu informationnel auquel fait face le pays est tellement "complexe" que, dit-il, "les évolutions technologiques et leurs usages diversifiés dans les entreprises médiatiques au Maghreb comme ailleurs tendent à induire de nouvelles pratiques professionnelles et spécialisations (...) Le vocabulaire de la discipline se redessine, la mise en pratique quotidienne se métamorphose et l'émaillage prend une autre forme et une adaptation professionnelle très sérieuse". La fracture numérique qu'a subie le pays, durant les années 2000, et l'arrivée des technologies de pointe et de l'intelligence artificielle ont sérieusement impacté sur la pratique journalistique à tel point que les fake news ont provoqué des dérives gravissimes chez certains médias où la course au scoop a pris le dessus sur le contrat moral qui lie le journaliste à ses lecteurs. "Parce qu'il est le média de tous les médias, Internet a révolutionné les formes de conception, de diffusion et de réception de l'information", a développé le Dr Fatima Zohra Taïebi. Dans son intervention, l'enseignante Ryma Rouibi a jugé que "le renouement avec la bonne pratique journalistique" devra constituer, au quotidien, un rempart pour les journalistes pour ne pas tremper leurs plumes dans les fake news, appelant à saisir l'enjeu de l'éducation aux médias en Algérie. Pour sa part, l'enseignante Amina Chemami a cerné les modèles législatifs internationaux dans la lutte contre les fake news, non sans les comparer aux arsenaux juridiques algériens dans le domaine de la presse qui, selon elle, devront être revus pour s'adapter aux nouvelles menaces, tout en garantissant la liberté de la presse. Un débat s'en est suivi avec des représentants de médias, dont Liberté, sur la pratique quotidienne du journalisme et la lutte contre les fake news au niveau des rédactions. À noter que les modérateurs Malika Lamoudi, Fella Bourenane et Cherif Deris devront soumettre, bientôt, les interventions des participants aux organisateurs pour sanctionner ce colloque par une série de recommandations.