À la différence des grandes métropoles, où les nuits sont aussi animées que les jours et probablement davantage, en ce mois de ramadan, des villes de l'intérieur du pays, telle que Mila, la période nocturne est plutôt vécue dans une espèce de platitude monotone en raison de l'absence regrettable d'espaces de détente et de programmes spéciaux. À Mila, et cela est visible tant au niveau du chef-lieu que dans les communes de la région, les veillées ramadanesques se déroulent tout bonnement dans les cafés autour de jeux de dominos, de cartes et de bingo ou jeu de pions, comme il est appelé par paraphrase. En effet, ici, les soirées commencent immédiatement après la rupture du jeûne. La courte accalmie qui succède à l'appel du muezzin passée, les gens se retrouvent massivement dans les cafés. Et une fois les consommations habituelles (café, thé, boissons gazeuses…) prises, on verse presque aussitôt dans les jeux de cartes, de dominos et autres. Même les fidèles, qui se rendent dans les mosquées pour les tarawih, rejoignent les terrasses des cafés, participant en spectateurs à ces distractions nocturnes. Parmi les jeux auxquels on s'adonne tout particulièrement en ce mois, on retrouve la traditionnelle ronda, les dominos, la belote et le jeu dit de pions. La ronda et les dominos, jeux en passe de disparition ou du moins très peu pratiqués par les jeunes générations, attirent surtout les personnes d'un certain âge. L'autre jeu pratiqué exclusivement pendant les nuits de ramadan est celui dit de pions, appelé bingo ou encore injustement loto. Très récent dans la région de Mila, ce jeu est encore pratiqué dans quelques communes seulement comme Mila, Grarem, Zeghaïa et Sidi Mérouane. Le bingo est un jeu d'argent, pratiqué par la population des chômeurs tout particulièrement. Il se joue au moyen de cartes numérotées et de dés, appelés pions, numérotés également. Les adeptes de ce jeu, on les retrouve jusqu'à des heures tardives dans des locaux fermés et retirés des centres urbains. Et les parties sont continuellement marquées de cris, de protestations, voire de luttes musclées. L'(en) jeu en vaut évidemment la chandelle. Et les jeunes sociétaires ne quittent leurs locaux que les yeux embués, le visage en feu et la mine complètement défaite… La soirée est terminée. Kamel Bouabdellah