Cette affaire a provoqué une grave crise diplomatique entre Paris et Washington, la France évoquant pour sa part "une rupture de confiance majeure". Le Premier ministre australien a répliqué hier aux accusations de "duplicité" formulées par Paris sur son intention de rompre un contrat d'achat de sous-marins, tandis que le président américain aura l'occasion de s'expliquer dans les prochains jours avec son homologue français lors d'un échange téléphonique. "Le président Biden a demandé à parler au président de la République (Emmanuel Macron) et il y aura un échange téléphonique dans les tout prochains jours", a indiqué le porte-parole du gouvernement français, Gabriel Attal. "On veut des explications" sur ce qui "s'apparente à une rupture de confiance majeure", et aussi savoir "comment ils entendent sortir de ce contrat", avec des "compensations" à la clé, a-t-il précisé sur BFMTV. La décision de l'Australie d'annuler le contrat d'achat de sous-marins français en faveur de navires américains à propulsion nucléaire a suscité l'indignation de Paris. Emmanuel Macron a rappelé les ambassadeurs de France à Canberra et à Washington dans un geste sans précédent. Il devait s'entretenir avec eux hier soir, a ajouté M. Attal. Plus tôt dans la journée, le Premier ministre australien, Scott Morrison, avait rejeté les accusations françaises de duplicité. "Je pense qu'ils auraient eu toutes les raisons de savoir que nous avions de profondes et graves réserves quant au fait que les capacités du sous-marin de classe Attack ne répondaient pas à nos intérêts stratégiques et nous avions clairement indiqué que nous prendrions une décision basée sur notre intérêt stratégique national", a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse à Sydney. "Je ne regrette pas la décision de faire passer l'intérêt national de l'Australie en premier. Je ne le regretterai jamais", a-t-il ajouté, déclarant qu'il aurait été "négligent" d'aller de l'avant contre les conseils des services australiens de renseignement et de la défense. Les sous-marins à propulsion nucléaire sont notamment plus autonomes que les sous-marins à propulsion conventionnelle (diesel-électrique). S'exprimant sur la chaîne de télévision France 2 samedi, le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, avait évoqué une "crise grave" et dénoncé une "duplicité" de Canberra et Washington. "Il y a eu mensonge, il y a eu duplicité, il y a eu rupture majeure de confiance, il y a eu mépris, donc ça ne va pas entre nous", a-t-il déclaré. Le rappel de l'ambassadeur français à Londres, qui fait également partie du pacte de sécurité, a été jugé inutile. "On connaît leur opportunisme permanent", a-t-il ironisé, quelques mois après le Brexit. Pour sa part, la nouvelle ministre britannique des Affaires étrangères, Liz Truss, a défendu hier dans une tribune l'approche de Londres, qui entend "faire preuve de fermeté dans la défense de nos intérêts". Les Etats-Unis, l'Australie et le Royaume-Uni ont annoncé mercredi un partenariat stratégique pour contrer la Chine, Aukus, incluant la fourniture de sous-marins américains à propulsion nucléaire à Canberra, qui a sorti de fait les Français du jeu. La France avait signé en 2016 un contrat de 90 milliards de dollars australiens (56 milliards d'euros) pour la fourniture à l'Australie de 12 sous-marins à propulsion diesel, souvent qualifié de "contrat de siècle" en raison de son ampleur et de sa portée stratégique.