Surnommées “sites noirs”, des camps de prisonniers ont été ouverts par les Etats-Unis dans huit pays, dont la Thaïlande et l'Afghanistan, ainsi que dans des pays d'Europe de l'Est, dont les noms n'ont pas été révélés à la demande des autorités américaines. Les députés européens, qui se sont emparés du dossier, déclarent ne pas rester les bras croisés. La délocalisation de lieux d'interrogation, mis en place au lendemain des attentats du 11 septembre 2001 avec le feu vert de Bush, est l'une des pièces centrales des services de renseignement américains. Selon le journal américain, plus de 100 suspects sont détenus en dehors de toute règle de droit dans ces centres dont la CIA nie officiellement l'existence. Ces révélations font suite à celles, divulguées en mars dernier, concernant l'existence de “charters de la torture” de la CIA. La chaîne de télévision CBS avait montré que les services secrets utilisaient un avion pour transférer des terroristes présumés vers l'Egypte, l'Arabie saoudite, la Syrie, l'Ouzbékistan ou encore la Jordanie, autant de pays pourtant dénoncés par le Département d'Etat pour pratiquer la torture dans leurs prisons ! Ebranlés par ces pratiques ainsi que par le scandale des sévices de la prison d'Abou Ghraïb près de Bagdad, les sénateurs emmenés par le républicain John McCain ont adopté, début octobre dernier, une proposition de loi visant à bannir tout traitement “dégradant, inhumain ou cruel” de prisonniers. La Maison-Blanche, agacée, tente d'empêcher le vote de ce texte à la Chambre des représentants, plus conservatrice que le Sénat. Dick Cheney, le vice-président, a vainement essayé d'obtenir de McCain un moratoire autorisant la mise en œuvre de la torture lors des opérations de contre-terrorisme et de soustraire la CIA à son champ d'application. Mais il a été rattrapé par un scandale dont son chef de cabinet fait les frais. Le Pentagone quant à lui s'est engagé dans un bras de fer contre l'ONU qui refuse de visiter la base de Guantanamo à Cuba, tant que Donald Rumsfeld, le secrétaire à la Défense, refuse de laisser ses inspecteurs interroger librement les détenus. D. B.