Bien avant d'être ministre et au cœur de la crise entre le Liban et les pays du Golfe, Kordahi officiait dans une chaîne du groupe média saoudien, MBC. Une vieille connaissance donc. Il a le mérite a posteriori d'avoir dénoncé le terrorisme d'Etat des pays de la coalition arabe. Georges Kordahi, le ministre libanais de l'Information dont les propos sur la guerre au Yémen avaient provoqué fin octobre une grave crise diplomatique avec des Etats du Golfe, a démissionné vendredi dans l'espoir d'apaiser les tensions. Cette démission intervient à la demande du Premier ministre, Najib Mikati, et indirectement par le président français Emmanuel Macron en visite dans les pays du Golfe. Le soutien de M. Macron est a minima puisqu'il n'a pas eu l'écho d'un ferme engagement notamment de l'Arabie saoudite, dernière étape de sa visite dans la région quant à la normalisation avec le Liban, pays déjà meurtri et dont la crise provoquée par le royaume a fini par le terrasser, économiquement. M. Kordahi, soutenu par le Hezbollah pro-iranien, a dit lors d'une conférence de presse espérer que sa démission puisse "ouvrir une fenêtre (...) pour l'amélioration des relations bilatérales" avec l'Arabie saoudite et ses alliés régionaux. Le royaume saoudien a rappelé fin octobre son ambassadeur à Beyrouth et expulsé l'ambassadeur libanais à la suite de propos de M. Kordahi critiquant l'intervention militaire de Riyad aux côtés des forces gouvernementales au Yémen et défendant les rebelles houthis pro-iraniens. Ont suivi par la suite, le Bahreïn, les Emirats arabes unis et le Koweït avec des sanctions contre le Liban. Les propos de Kordahi ne sont qu'un prétexte, prononcés en août, ressortis finalement en octobre dernier, pour l'Arabie saoudite pour tenter de neutraliser le Hizbollah ou à tout le moins réduire son influence au Liban. Cette logique s'inscrit dans la guerre entre le royaume wahhabite et l'Iran, grand parrain du Hizbollah chiite, grand rival du courant sunnite incarné par Harriri, le grand perdant de la reconfiguration politique au Liban. "J'ai décidé d'abandonner mon poste ministériel", a ajouté Kordahi, indiquant vouloir "profiter" de la tournée dans le Golfe du président français Emmanuel Macron, très engagé depuis un an pour aider le Liban à sortir de la pire crise économique de son histoire. "J'ai compris de M. Mikati que les Français veulent que je démissionne avant la visite de M. Macron à Riyad parce que cela pourrait les aider à entamer un dialogue avec les responsables saoudiens concernant le Liban et l'avenir des relations bilatérales," a dit M. Kordahi aux journalistes. Selon M. Kordahi, le Premier ministre libanais "a reçu des garanties que M. Macron allait entamer un dialogue avec l'Arabie saoudite concernant la reprise des relations bilatérales". Trop beau, ce cadeau du président français dont la tournée a surtout un caractère économique au vu des contrats de vente d'armes qu'il a conclus. M. Macron s'est montré compréhensif même s'il n'a pas enlevé sa casquette de "protecteur" du Liban et défenseur du président Aoun, un chrétien comme Kordahi, allié tactique du Hizbollah. Mais ce que révèle au grand jour cette affaire est le rôle militaire grandissant des Emirats arabes unis qui, selon des observateurs, ont joué et continuent de jouer un rôle déstabilisateur dans plusieurs Etats et participent dans les opérations militaires. Ce qui explique leur contrat avec la France qui, par ailleurs, leur garantit une certaine "impunité" internationale.