Après l'Arabie saoudite et Bahreïn, le Koweït a décidé, hier, d'expulser le chargé d'Affaires libanais du pays et de rappeler son ambassadeur à Beyrouth, après des déclarations du ministre libanais de l'Information à propos de la guerre au Yémen. «L'Etat du Koweït a décidé le rappel pour consultations de son ambassadeur au Liban et le départ du chargé d'Affaires de l'ambassade de la République libanaise auprès du Koweït dans les 48h», a indiqué le ministère des Affaires étrangères, cité par l'agence officielle koweïtienne Kuna. Dans son communiqué, le ministère explique sa décision par l'»échec» du gouvernement libanais à «répondre aux propos inacceptables et répréhensibles tenus contre le royaume d'Arabie saoudite et le reste des (six pays) du CCG». Il pointe également l'«échec du gouvernement de la République libanaise à prendre les mesures nécessaires pour empêcher la contrebande de drogue (...) vers le Koweït et le reste des pays du CCG» (le Conseil de coopération du Golfe). L'Arabie saoudite a fait état au cours de la semaine écoulée de plusieurs opérations anti-contrebande, disant avoir confisqué des milliers de pilules de captagon (amphétamine) dissimulées dans des fruits importés. Vendredi, elle a rappelé son ambassadeur au Liban et demandé le départ du royaume de l'ambassadeur libanais en réaction aux déclarations du ministre libanais de l'Information qui critiquait l'intervention de la coalition militaire dirigée par Riyadh au Yémen. Elle a également décidé d'«arrêter toutes les importations libanaises», disant «regretter» la détérioration des relations avec le Liban, selon un communiqué officiel. Le petit royaume de Bahreïn a fait de même donnant 48 h à l'ambassadeur du Liban pour quitter son territoire. Dans une émission télévisée datant du 5 août et diffusée lundi dernier, Georges Kordahi, actuel ministre libanais de l'Information mais qui n'était à l'époque pas encore membre du gouvernement, avait qualifié «d'absurde» la guerre menée depuis 2015 au Yémen par la coalition militaire en appui du gouvernement, et estimé qu'il était «temps qu'elle s'arrête». Il avait ajouté que les rebelles Houthis, soutenus par l'Iran, se défendaient «face à une agression extérieure» et que «leurs maisons, leurs villages, leurs mariages et leurs enterrements étaient bombardés» par la coalition. Riyadh a estimé que ces propos portaient «atteinte aux efforts de la coalition» et n'étaient «pas en harmonie avec les relations historiques» entre Beyrouth et Riyadh. M. Kordahi a souligné avoir tenu des propos reflétant son «opinion personnelle» avant sa nomination le 10 septembre. Il a assuré ne «pas avoir attaqué l'Arabie saoudite» mais s'est abstenu de présenter des excuses. L'affaire a embarrassé le Premier ministre libanais Najib Mikati, d'autant plus que le Liban mise toujours sur une potentielle aide financière du Golfe pour relancer son économie en plein effondrement. Il a dit vendredi soir «regretter profondément la décision du royaume» et espéré que «la direction saoudienne, avec sa sagesse, la reconsidérera». Le Premier ministre libanais a redit son respect pour le roi saoudien et son prince héritier et exprimé le «rejet ferme et catégorique de tout ce qui nuit aux relations fraternelles profondes avec le royaume, qui a toujours été aux côtés du peuple libanais face à ses grands défis». Il a affirmé vouloir «maintenir les meilleures relations avec le royaume» et rappelé que les propos de M. Kordahi «ne reflétaient en aucun cas la position du gouvernement». L'affaire a été abondamment commentée sur les réseaux sociaux, soulignant les divisions politiques au Liban entre pro et anti-Saoudiens. Dans un tweet, le ministre yéménite de l'Information Maammar al-Iryani a reproché à M. Kordahi d'avoir omis de mentionner les exactions des rebelles houthis.