Le prix de la laine a reculé au cours des dix dernières années, passant de 1 000 à 500 DA le kilo. Le changement de mode de vie du citoyen, le net repli du nombre d'activités liées à ce produit et surtout la concurrence d'autres matières, naturelles et industrielles, ont fragilisé la filière. La wilaya de M'sila enregistre sa plus faible production de laine depuis des années, soit 25 000 quintaux seulement, a-t-on appris des services de la wilaya. Le troisième producteur national de cette matière première naturelle est frappé par une sécheresse inédite, la chute du pouvoir d'achat, l'augmentation des prix de la viande et une baisse de la demande, ce qui oblige les éleveurs à ne pas abattre leurs moutons. La sécheresse sévit surtout dans le sud de la wilaya où est concentrée la majorité de l'élevage de moutons. Conséquence : le bétail n'a pas de quoi brouter. Certains éleveurs, en grande difficulté, sont donc contraints de s'endetter pour acheter du fourrage, alors d'autres n'ont pas d'autre choix que d'abattre les moutons pour vendre leur viande. "Mais la logique économique de l'offre et de la demande ne s'est pas appliquée sur le marché local. Avec la baisse de production de la laine à M'sila, les prix ont baissé aussi !", dit un éleveur de la région. En effet, le prix de la laine a reculé ces dix dernières années pour descendre sous le seuil de 500 DA le kilo, soit une baisse de plus de 200 DA, par rapport à la saison précédente, après que son prix ait atteint un pic de plus de 1 000 DA le kilo il y a 10 ans. Le changement de mode de vie du citoyen, le net repli du nombre d'activités liées à ce produit et surtout la disponibilité d'autres produits naturels ou industriels à moindre coût et efforts sont d'autres causes qui ont fragilisé la filière. "Il n'y a pas longtemps, le matelas en laine faisait partie intégrante du trousseau de la mariée. Et c'était un signe de richesse. Maintenant, il est remplacé par des produits synthétiques plus légers, moins chers et plus pratiques", regrette cette femme de la région de Bou Saâda qui ajoute que même l'usage individuel de la laine répondant à des besoins domestiques n'est plus pratiqué dans plusieurs maisons de la région. "Jadis la femme était surtout épousée pour son savoir-faire. Une femme qui ne savait pas tisser ou transformer la laine n'était pas prisée", explique cette Boussaâdie. "Avant, il y avait le tissage des couvertures et des tapis traditionnels tels que l'henbel, l'haouli, le hayek et certains habits féminins, à l'exemple du louqa, un genre de poncho à base de pure laine", ajoute-t-elle, précisant que même pour les vêtements d'hommes très appréciés dans la région, la kachabia et le burnous, la laine blanche est peu utilisée. "C'est la laine de chameau qui connaît ses heures de gloire pour la confection de la kachabia et le burnous en oubar et qui sont vendus sur le marché à des prix très élevés", précise-t-elle. De nombreux éleveurs soulèvent le problème du manque de manufactures ou d'ateliers de fabrication de tapis et couvertures et, plus particulièrement, de tisserands qui étaient les seuls à s'approvisionner en laine brute, traitée et filée. "Cette situation est très inquiétante. Il faut penser à industrialiser ce produit et à créer des ateliers pour la confection artisanale", propose un éleveurs. "Nous avons la matière première (bio) et le savoir-faire. Il ne faut juste une autre vision de la commercialisation de ce produit. Passer d'un produit brut à un produit fini", propose ce spécialiste en création d'entreprise. "À l'étranger, un tapis ou habit en laine coûte très cher", rappelle le spécialiste. Pour ce dernier, les éleveurs, les artisans et les pouvoir publics doivent s'unir et s'investir dans ce créneau encore vierge en créant des manufactures de laine et des collections de tapis et d'habits bio.