Selon les spécialistes, cette tendance baissière est liée aux derniers scandales, qui ont secoué certaines banques, et aux nouvelles dispositions réglementaires relatives aux importations de véhicules de moins de trois ans. à toute chose malheur est bon. Cela semble se vérifier même dans les affaires. En effet, ces jours-ci on assiste à un véritable phénomène monétaire, aussi bien sur le marché officiel que sur le marché parallèle de la devise où on enregistre une chute surprenante et inattendue des cours de l'euro dont le niveau de la dépréciation mérite d'être relevé, du moins pour tenter de situer les raisons d'un tel recul et de percer les secrets d'un marché pas seulement soumis aux lois de l'offre et de la demande. Actuellement, cette monnaie est affichée au taux bancaire à 88 da pour un euro alors qu'il n'y a pas si longtemps, il touchait la barre des 96 da, voire 98 da, et ce, au bénéfice des importateurs et autres opérateurs versés dans le commerce extérieur. Sur le marché parallèle, en revanche, 1 euro s'échange actuellement contre 102 et 104 da alors qu'il flirtait durant une longue période avec le seuil de 11,60 et 11,80 da. Faut-il, donc, comprendre que cela est dû à une quelconque inondation du marché en monnaie européenne ou pencher vers l'hypothèse d'une forme de rareté du dinar qui expliquerait cette tendance baissière ? En fait, avons-nous appris à la faveur d'une enquête menée sur les deux marchés, une amorce de stabilité et de décantation sur la filière import est en train de prendre forme suite aux derniers scandales déclarés au niveau de la bna et de la Badr, ou en conséquence, une certaine inquiétude a gagné la sphère des affaires. cela s'est traduit par certaines réticences des banques qui ont observé une rigueur de circonstance à l'endroit de toute importation ; donc de toute demande d'imputation sur l'enveloppe devise d'une part, poussant certains à reporter leurs intentions de domiciliation. D'autre part, si le recul de la demande en devise est relevé sur les deux marchés, expliquant, ainsi que la baisse de l'euro est liée aux appréhensions bancaires en matière de domiciliation, il faut de même ajouter que depuis l'entrée en vigueur de la fameuse ordonnance interdisant l'importation de véhicules de moins de trois ans a sérieusement pesé, notamment sur le marché parallèle source d'approvisionnement pour une moyenne annuelle de 70 mille véhicules. par ailleurs, la possibilité donnée aux invalides de guerre — à travers la loi de finances pour 2006 de pouvoir acquérir désormais des véhicules auprès des concessionnaires domestiques en dinars alors qu'ils étaient tenus de le faire en devises —, s'avère comme une autre donne qui a bouleversé la demande en devises. S'agissant des importateurs, tout semble indiquer que les derniers scandales bancaires ont eu l'effet d'une décantation, dans la mesure où ceux qui recourent au marché parallèle de la devise sont ceux-là mêmes qui éprouvent le besoin de sous-facturer leurs importations pour des raisons évidentes de fuite fiscale. Or, selon des sources bancaires, on enregistre actuellement au niveau de la banque d'Algérie, un nombre impressionnant d'opérateurs frappés d'interdiction de domiciliation bancaire. Une liste très longue circule dans les services de veille des circuits bancaires, comme on nous l'a attesté : “jamais un nombre aussi important d'interdictions bancaires n'a été auparavant enregistré.” cette catégorie d'opérateurs a, elle aussi, déserté le marché de la devise où elle exprimait de gros besoins. s'il est vrai, également, que le préalable d'enregistrement fiscal avant chaque opération d'importation imposée avant domiciliation par l'administration des impôts a réussi, un tant soit peu, à contenir la fraude en véhiculant des effets dissuasifs, il est utile de mentionner, néanmoins, l'entrée en jeu des verrous réglementaires relatifs aux conditions d'établissement des registres du commerce. La maîtrise de ce document par les pouvoirs publics engagés dans la lutte contre la location des registres à travers un durcissement réglementaire et des contrôles en amont tend à donner des fruits, de l'avis même des importateurs qui n'ont pas eu trop de mal à le reconnaître. Aussi, si cette valeur nouvelle de l'euro, que vient de nous livrer le marché, parvenait à s'inscrire dans la durée, il serait aisé alors de conclure à une autre stabilité économique arrachée et au terme de laquelle ne sera pas exclue l'option de fixer une parité réelle à la monnaie nationale. En fait, tant que l'orientation de notre économie reste tournée inéluctablement vers le recours aux importations, l'euro se place malgré tout comme notre seconde monnaie. Pour la simple raison que plus de 60% de nos achats extérieurs sont libellés dans cette monnaie. ABDELKRIM WAHIB