Damas reste au centre du tourbillon provoqué par le vice-président démissionnaire, qui a réitéré, vendredi, à la commission d'enquête des Nations unies, les propos accusateurs contre le régime syrien. Prenant le soin de ne pas refuser directement la demande d'audition formulée par la commission d'enquête onusienne sur l'assassinat de Rafic Hariri, le chef de l'Etat syrien veut que la requête repose sur une assise juridique. “Nous avons dit à plusieurs reprises que nous sommes prêts à coopérer pleinement avec la commission d'enquête de l'Onu, mais cette coopération doit se faire sur une base juridique. Or, la demande d'audition du président de la République syrienne et de son ministre des Affaires étrangères n'a pas de base légale”, a-t-il déclaré dans un entretien accordé à un hebdomadaire cairote. Entre-temps, son ancien bras droit était auditionné par les enquêteurs de l'ONU. “J'ai reçu hier après-midi la commission d'enquête sur l'assassinat du martyr Hariri”, a-t-il déclaré hier à la presse. Même s'il s'est abstenu de divulguer le nombre, l'identité des enquêteurs et le contenu de ses déclarations, Abdelhalim Khaddam a réaffirmé que Bachar al Assad avait menacé à plusieurs reprises Rafic Hariri. “Je connais les faits parce que j'ai entendu moi-même Bachar al Assad. Mais le jugement du poids de ces menaces et l'implication ou non de Bachar al Assad reviennent aux enquêteurs”, a indiqué l'ancien ministre des Affaires étrangères syrien. Détaillant les menaces qu'il a lui-même entendues, il dira : “Un jour, Bachar a convoqué Rafic Hariri en présence d'officiers de sécurité et il l'a rudoyé. Il l'a accusé d'agir contre la Syrie et d'œuvrer pour l'élection au Liban d'un président antisyrien. Il a dit que c'est lui qui décidait, et il a ajouté : celui qui va à l'encontre de mes décisions, je le liquide". Il a fait remarquer que les services syriens ne pouvaient avoir été impliqués dans l'assassinat de Rafic Hariri à l'insu de Bachar al Assad. “Rien ne se fait sans l'autorisation du président. Les questions de sécurité sont toutes dans la sphère de contrôle du président”, a insisté Khaddam. Continuant sur sa lancée, il précisera : “Si un ressortissant syrien a été impliqué là-dedans, il ne peut pas l'avoir été sans une décision émanant du président. S'il y a une preuve contre un petit agent du renseignement, le président de la Syrie en porte la responsabilité.” Sans hésiter, l'ancien vice-président syrien lancera un autre pavé dans la mare en évoquant l'éventualité d'un procès de Bachar al Assad. “Si des preuves suffisantes désignent le président, alors il devra être jugé”, dira-t-il. Estimant que “les Syriens n'accepteront pas d'être gouvernés par un criminel”, il ajoutera : “Ce que je veux, c'est un changement de régime. J'espère que ça ne prendra pas plus de quelques mois.” Abdelhalim Khaddam est aussi revenu sur le fait d'avoir mis en garde l'ancien Premier ministre libanais en lui conseillant de quitter Beyrouth. “Deux mois avant son assassinat, je lui avais conseillé de faire ses bagages et de prendre un avion”, a rappelé l'ex-numéro deux syrien. K. ABDELKAMEL