La librairie Chihab Internationale a organisé une rencontre, mardi 17 janvier, avec la presse autour du bilan de l'année littéraire 2005. Plusieurs thèmes ont été au centre des débats animés par les journalistes Rachid Mokhtari, Djamel Chaâlal et Mohamed Baghali, dirigés par l'animatrice Yasmine Belkacem. Premier thème abordé, les coups de cœur, coups de chapeau au sein de l'activité éditoriale algérienne 2005. Pour R. Mokhtari (journaliste et critique littéraire), La nuit des origines de N. Saâdi constitue l'événement littéraire 2005. “Le roman échappe aux thématiques liées à la société et à l'islamisme, communes aux écrits des dix dernières années. Tout en apportant une forme esthétique originale, la forme romanesque est hydride, non atteinte ; on pourrait le comparer à Céline, dans le sens où les dialogues sont fondus dans le corps narratif. On constate que l'espace de la mémoire est un assemblage de deux parties dichotomiques : la mémoire spécifique et la mémoire universelle, défragmentée. L'auteur y souligne une certaine obsession de l'espace où les venelles des quartiers arabes de Constantine sont transposées sur celles des puciers de St-Ouen. Originalité des formes esthétiques, subjectivité de l'auteur, production d'émotions (joie-peine), c'est là que réside l'art et la production artistique de l'auteur”. Le journaliste ajoute : “En dépit de son titre emblématique, ce roman est passé inaperçu dans les médias.” Le supplément culturel Second thème débattu : “La naissance des suppléments culturels ou littéraires dans la presse en 2005 : Expérience d'El Watan et d'El Khabar”. Selon R. Mokhtari, il est d'usage qu'un “lecteur” existe au sein de la rédaction culturelle du journal, et dont la fonction est de rendre compte aux lecteurs, de ses critiques et de ses appréciations. Le constat est navrant. Aucun “lecteur” ne figure dans la presse algérienne, tout comme aucune revue culturelle ne figure dans l'espace médiatique national ; de ce fait, le “supplément culturel” reste le palliatif et supplée en quelque sorte au vide, en rendant compte de la réalité culturelle. Coédition, piratage, politique du livre C' est le thème qui a soulevé tous les questionnements. Selon D. Chalaâl, “le marché du livre est en stagnation car les Algériens achètent peu. Cependant, les éditeurs se sont impliqués dans un travail de longue haleine ; ils ont été sensibles à des travaux et à des débats ; l'édition algérienne d'aujourd'hui suit les débats actuels, ce qui permet de constater une certaine maturité dans l'édition en Algérie qui ne peut qu'aboutir à un réel professionnalisme ; pour preuve, la qualité et la maîtrise des ouvrages de l'Enag et de l'OPU par exemple. Il est heureux de constater que la préoccupation culturelle reprend ses droits.” Apic, jeune maison d'édition, par le biais de son représentant, exprime sa satisfaction pour 2005. Contacts avec la presse et ventes-dédicaces ont reçu un écho favorable. L'Enag quant à elle a institué l'Agora qui se veut être un relais d'échanges entre éditeur et presse, et même entre éditeurs. L'année 2005 fut féconde dans tous les domaines, historique, didactique et parascolaire. Deux nouveaux écrivains, Mati et Guessouma, se définissent en “intrus” dans la littérature, car venant d'horizons différents. Toujours dans ce chapitre de la politique du livre, il fut signalé les remous dans le monde du livre en 2005. Le syndicat des éditeurs a été secoué par des conflits, et marqué gravement par le coup fatal qui lui a été porté, concernant l'arrêt, décidé par le ministère de l'Education de la production du livre scolaire. La loi de finances 2006 n'apporte rien de concret ni dans l'importation du livre ni dans celle des intrants dans la machine de fabrication du livre. Quant au piratage, il se taille la part belle sur les étals des libraires au nez et à la barbe des ayants droit et de l'Onda qui ne manifestent aucune réaction. Le Sila 2005 ? “L'aspect commercial a prévalu sur l'aspect culturel. La production algérienne a été marquée par une certaine faiblesse et les comptes-rendus de presse ont relevé cette pauvreté éditoriale”, selon R. Mokhtari. Selon D. Chaâlal, “le salon s'est tout bonnement transformé en bazar. Les éditeurs ne se déplacent pas et se font représenter par des importateurs. Le prochain salon sera une librairie à grande échelle, sans aucun sens culturel, ni civilisationnel”. Selon M. Baghali, “la première vocation d'un salon est l'animation culturelle, et les maisons d'édition se doivent d'organiser des ventes-dédicaces en déplaçant un écrivain au salon. Ces deux paramètres n'ont pas figuré au Sila 2005”. Pensée pour les auteurs disparus Najia Abeer, Sadek Aïssat et Djamel Eddine Bencheikh. Le parcours littéraire de chacun a été évoqué par les journalistes présents au débat. N. S.