Résumé : Grelottant de froid et courtisée, la Bohème consentira à monter dans la voiture d'un commerçant. Ce dernier engage la conversation avec elle. Par un matin pluvieux, et après avoir tendrement embrassé sa maternelle, et pleurer un bon bout temps dans ses bras, elle prit le chemin de la ville.Où ira-t-elled ? Elle n'avait aucune idée, mais tout en marchant, elle entendait les klaxons des automobilistes, et remarquait les têtes qui se retournaient sur son passage. Elle se savait belle, oui, une beauté saine et sauvage, un mélange de soleil et de fraîcheur. Mais en ce moment, elle savait surtout qu'elle avait très froid et très faim. Elle avait les pieds gelés et ses maigres sandales en caoutchouc ne lui étaient d'aucun secours. Elle continue de marcher au bord de la route et sentait de temps à autre le bébé bouger dans son ventre. Elle s'arrête et y porte la main pour le sentir davantage dans son corps. Comme c'est bizarre, se dit-elle, d'aimer cette “ petite chose ” qui remuait sans cesse depuis quelque temps dans ses entrailles. Et pourtant, elle aurait fait n'importe quoi pour s'éviter cette délicate situation. Elle se met à caresser circulairement son ventre, et se dit qu'après tout, ce petit ange qui prend vie en elle n'y est pour rien. Elle s'arrête un instant pour souffler. Ses jambes gonflées et lourdes ne la supportaient plus. Un quart d'heure plus tard, elle se remet à marcher, toujours en direction de la grande ville. Le chemin devenait de plus en plus long devant elle. Son estomac criait toujours famine. Elle remet son foulard sur la tête et resserre le vieux manteau qu'elle portait sur une robe longue autour de son corps. Ainsi, on ne remarquerait pas trop son état. Clopinant dans les flaques d'eau, elle reprit sa cavale. Elle avait l'impression que le froid l'avait entièrement engourdie. Ses pieds pesaient une tonne et elle sentait l'air glacé pénétrer à l'intérieur de sa robe, ou enfin de ce qui ressemble à une robe. En réalité, ce n'était qu'une vieille gandoura de sa mère, qui avait des manches assez longues et était assez vaste. Cette robe était trop large pour elle, il fut un temps. Mais aujourd'hui, c'est le seul vêtement dans lequel elle pouvait “ entrer ” . Une longue voiture s'arrête à son niveau. Elle remarque que le conducteur lui faisait signe. Elle grelottait de froid et essayait de réchauffer ses mains en les portant à ses lèvres. Le conducteur continuait inlassablement ses signes, puis se met à klaxonner pour attirer son attention. Elle hésite un moment, puis se dit que dans son état, plus rien de pire ne pouvait lui arriver. Le froid eut raison d'elle, et elle s'approche de la portière ouverte à son intention. Une dentition or et argent l'accueille. Un sourire glacé se dit-elle. Un commerçant peut-être. L'homme devait avoir une soixantaine d'années. Il avait une barbe grisonnante, et portait une chéchia en velours. - Monte. Monte ma fille ! Tu fais pitié à te voir comme çà sous la pluie. La jeune femme s'exécute et s'installe sur le siège du passager. - Vous vous rendez en ville, je suppose ? Elle hoche la tête. - À pied…sous cette pluie torrentielle ! Elle hausse les épaules, impuissante. - Tu n'es pas très bavarde, toi. Bon ! je me présente.. : Omar D. On m'appelle Si Omar ! Commerçant en fruits et légumes. Et toi ? - Euh… - Eh bien, de quoi as-tu peur ? Tu dois avoir l'âge de ma fille… Dis-moi au moins ton nom ? (À suivre) Y. H.