Condoleezza Rice et Sergueï Lavrov n'ont pas caché devant la presse américaine les désaccords sur de nombreuses questions, telles la démocratie, le commerce ou le programme nucléaire iranien. Alors que la secrétaire d'Etat américain aux Affaires étrangères n'a pas caché ses appréhensions au sujet de la démocratie en Russie, son homologue russe a déploré que les Etats-Unis demeurent le principal obstacle à l'adhésion de son pays à l'Organisation mondiale du commerce. Ce différend a atteint un tel seuil que Sergueï Lavrov s'est cru obligé d'assurer à son homologue américaine qu'il n'avait pas soufflé à un journaliste russe sa question sur le commerce. “Vous confirmez que vous ne l'avez pas soufflée ? C'est sûr ?” a demandé la première responsable de la diplomatie de l'Administration Bush. Condoleezza Rice a poussé le bouchon plus loin en étalant ses inquiétudes sur la réduction de la liberté de la presse sous la présidence de Vladimir Poutine. Il faut dire que la méfiance est toujours de mise entre les deux parties. “Bien que nos méthodes pour atteindre les objectifs (...) ne coïncident pas nécessairement (...) les objectifs (...) sont néanmoins identiques et partagés”, a indique Sergueï Lavrov à la presse pour montrer que Moscou et Washington sont loin d'être sur la même longueur d'ondes, bien qu'il se soit efforcé de souligner les domaines de coopération, notamment la non-prolifération nucléaire. Les réserves que nourrissent les Américains sur le respect des droits de l'homme dans la Fédération de Russie font grincer les dents du patron du Kremlin, qui n'avait d'ailleurs pas manqué d'en faire la remarque à George Bush lors de leur rencontre l'année dernière en Slovaquie. La paix au Proche-Orient est l'un des points sur lesquels Russes et Américains sont aux antipodes l'un de l'autre. En effet, alors que le ministre de Vladimir Poutine présente les discussions avec le mouvement palestinien Hamas comme une étape pour convaincre le Hamas d'accepter les accords de paix israélo-palestiniens comme le réclament les grandes puissances occidentales, les Américains en minimisent la portée en insistant sur le fait que l'organisation islamiste n'avait pris aucun engagement. L'autre point de discorde entre les deux protagonistes est le nucléaire iranien. Sur cette question, Washington estime que les efforts russes pour aboutir à un compromis constituent une atteinte aux initiatives américaines visant à démontrer que les Etats-Unis ne sont pas responsables des échecs enregistrés jusque-là. Sergueï Lavrov a dû faire un démenti en public quant à l'existence d'une nouvelle offre russe de compromis. En réponse à une question d'un journaliste voulant savoir si le Kremlin était favorable à des sanctions contre l'Iran, le chef de la diplomatie russe a sèchement rétorqué : “Avez-vous vu une quelconque proposition de sanctions ? Cette question est hypothétique.” Il faut dire que cette explication entre les deux chefs de la diplomatie contraste avec les propos mielleux de Bush sur Poutine à son arrivée à la Maison-Blanche en 2000. K. ABDELKAMEL