M'hamed Benyamina et Akil Chraïbi, qui ont bénéficié des dispositions de la charte, sont recherchés pour leur rôle dans des réseaux terroristes implantés dans l'Hexagone “Malaise entre Paris et Alger”, titrait hier le quotidien populaire Le Parisien. Décidément, les rebondissements ne se comptent plus entre les deux capitales. Dernière péripétie, en attendant la prochaine, la libération de centaines de terroristes en Algérie dans le cadre de la mise en œuvre de la politique de réconciliation nationale. Il n'y a bien sûr pas de réaction officielle en France. En son temps, Paris avait salué une “consultation démocratique” dans le référendum organisé au mois de septembre, s'attirant les foudres de l'opposition. Entre les services de sécurité des deux pays, la coopération a toujours été parfaite en matière de lutte contre le terrorisme. Un haut responsable algérien a d'ailleurs été reçu en janvier dernier à Paris par le ministre de l'Intérieur, Nicolas Sarkozy, qui a salué cette coopération. Mais un couac vient de se produire. Et il fait “grincer les dents” au ministère de l'Intérieur, à en croire Le Parisien. Il semble que certains anciens détenus élus au bénéfice de la liberté sont impliqués dans des affaires de terrorisme dans l'Hexagone et mis en cause par la justice française. Il s'agit de M'hamed Benyamina et de Akil Chraïbi. Le premier est considéré comme le chef d'un réseau islamiste démantelé en septembre 2005 par la DST, les services du contre-espionnage. Interpellé à Oran, il avait été entendu par la police algérienne à laquelle il aurait confirmé l'existence du réseau en France. Il aurait même confié des projets d'attentats visant le métro parisien, l'aéroport d'Orly ou même le siège de la DST. Les enquêteurs et magistrats français souhaitaient l'interroger sur place. Sa remise en liberté contrarie ainsi leur projet. Ils doivent donc attendre son hypothétique retour en France. Ce que confirme l'avocat du suspect à Paris, Me Mohamed-Salah Djemaï. “Mon client a l'intention de se rendre à la disposition de la justice française. Il sera de retour dans les tout prochains jours”, a-t-il assuré. Le deuxième cas est celui de Akil Chraïbi. Arrêté en septembre 2005 en Algérie, cet étudiant en informatique à Montpellier est soupçonné d'avoir fabriqué un système de détonateurs qu'il aurait acheminé vers les maquis du GSPC. Ces indications ont été fournies par ses complices arrêtés lors d'une importante opération antiterroriste menée en janvier en région parisienne. Une trentaine de personnes avaient été interpellées alors, dont onze ont été inculpées dans le cadre de cette enquête sur les filières jihadistes en France. Ces libérations massives ne sont pas sans inquiéter en France. Les ex-détenus ne sont pas tous connus des polices étrangères si le désir de “s'exiler” les prenait. Il faudra s'attendre à un renforcement des contrôles aux frontières car plusieurs autres terroristes libérés ou susceptibles de l'être peuvent intéresser la France qui se considère toujours comme une cible potentielle des réseaux islamistes. Le pays, frappé en 1995 par une vague d'attentats qui avait fait 12 morts et plus de 200 blessés, s'est d'ailleurs doté d'une doctrine de lutte dévoilée la semaine dernière dans un livre blanc. Un millier de personnes ont été emprisonnées pour des motifs terroristes au cours des deux dernières décennies. Une centaine d'individus est actuellement sous les verrous. Leurs réseaux, leur famille, leurs amis sont soumis à une surveillance constante. Quand ils sortent de prison, ils savent que les policiers ne les perdent pas de vue. Parmi les islamistes en détention aujourd'hui en France figure Rachid Ramda dont l'extradition n'a été obtenue que récemment de Grande-Bretagne, après 10 ans de procédure judiciaire. Présenté début mars devant le tribunal correctionnel de Paris, celui qui se fait appeler Abou Farès, a été jugé par le volet préparation des attentats de 1995. Le parquet a requis 10 ans de prison. Le jugement sera rendu le 29 mars. Il avait refusé de participer à son procès qu'il avait jugé “scandaleux” et interdit à ses avocats de plaider. Le tribunal qui s'est finalement contenté de lire les PV d'auditions du prévenu a mis en évidence ses liens avec les attentats de 1995. Il aura donc un autre procès devant la cour d'assises spéciale. Dans une de ses multiples adresses à Londres, était rédigé Al Ansar, la feuille propagandiste du GIA qui avait cessé de paraître en 1996. Pour les attentats de 1995, Boualem Bensaïd, Smaïn Aït Ali Belkacem et Karim Koussa ont été condamnés à 10 ans de réclusion. Le principal suspect a échappé au procès. Ali Touchent, qui est apparu comme l'architecte principal de ces attentats, a été tué dans un hôtel de la rue Tanger à Alger. Son identification n'avait été faite que plusieurs mois après sa mort. Yacine KENZY