Pourquoi l'institution militaire investit-elle, aujourd'hui, le champ médiatique ? Pour faire face aux nombreuses attaques qu'elle subit depuis plusieurs années ? L'Armée nationale populaire a, pour rappel, été ciblée par des médias étrangers et des organisations non gouvernementales, notamment à la suite du processus électoral en janvier 1992, entretenant la confusion sur le “qui tue qui ?” L'arrivée de Bouteflika à la magistrature suprême, en avril 1999, a accentué “la cabale” contre les généraux, contraignant l'ancien ministre de la Défense nationale à sortir de sa réserve et à défendre l'honneur de l'institution militaire. D'autres sorties médiatiques ont depuis été organisées par Khaled Nezzar et Mohamed Lamari en sa qualité de chef d'état-major. Ce dernier a informé, il y a plusieurs mois, de la politique de communication du ministère de la Défense, consacrée par l'installation de cellules de communication. Hier, les parlementaires ont organisé une visite à l'intérieur de la base de logistique de Béni Merad, dans la wilaya de Blida. Selon eux, cette initiative répond au souci de rapprochement entre l'armée et la société civile. Plus de 200 officiers de l'Armée nationale encadrent la base de la première Région militaire. Ces militaires, dont la moyenne d'âge varie entre 30 et 40 ans, gèrent quotidiennement quelque 1 800 personnes, parmi elles 1 600 civils recrutés au niveau des communes et wilayas avoisinantes : Blida, Alger, Tipasa... La première des choses qui saute aux yeux est l'émergence de cette nouvelle génération d'officiers, qui n'a rien à voir avec la précédente, en ce sens qu'elle ne revendique pas le “monopole” de la Guerre de Libération nationale. Une génération qui se réclame du “peuple algérien”, qui défend le rôle de l'institution militaire dans “la défense des frontières, l'unité et la cohésion nationales” et qui fait des merveilles, malgré l'embargo imposé au pays en matière d'armements militaires, depuis une décennie. A la base centrale logistique de Béni Merad, des hommes en casquette, aux côtés de civils, travaillent dans la rénovation et la modernisation des engins blindés (chars T55 et T72), appartenant aux divisions stationnées dans différentes wilayas, surtout au niveau des frontières ouest. Ils réalisent des “pièces sur modèle” pour les besoins du Commandement de l'armée, mais aussi sur demande des entreprises nationales (Sonatrach, SNVI, Poval, El-Hadjar). Ils rénovent des turbines à gaz et à vapeur, de grands transformateurs et des machines industrielles, entretenant des relations avec les entités industrielles, publiques et privées. Ils arrivent même à produire des véhicules blindés à roues qui servent au transport des troupes ou des fonds. Et à apporter un plus technologique aux engins blindés à roues et à chenilles, dont les porte-avions, ramenant ces derniers “de la 2e génération à la 4e génération” et prolongeant ainsi la durée de vie de matériels destinés à la défense du territoire. “Pourquoi faut-il que l'on voie le militaire avec seulement sa casquette ?”, nous a confié un jeune commandant pour qui l'ouverture de l'armée à la société civile vise non seulement l'image véhiculée par l'institution, mais aussi et surtout “l'existence d'une compétence technique”. Un autre officier, au grade de colonel, a déploré, lui, “les non-dits et les arrière-pensées” vis-à-vis de l'armée algérienne, estimant qu'on “n'a pas le droit de généraliser”. “Je suis Algérien avant d'être un militaire”, s'est défendu ce colonel, en espérant plus de modération dans les jugements de ses compatriotes et en applaudissant les initiatives de “rapprochement” avec les autres catégories de la population. La visite d'hier intervient dans un contexte national, dominé par une “précampagne”, en prévision de la présidentielle de 2004. Elle intervient également après les déclarations du général major Lamari au magazine français Le Point, la visite du Chef du gouvernement à Paris, aussitôt suivie par celle du président de la République. H. A.