Dans ce jeu de faux-semblant, les appétits silencieux se réveillent à chaque frémissement d'ambition personnelle. Il serait candide de considérer que la sortie de Mouloud Hamrouche, au-delà de sa substance politique assez neutre, ne constitue pas un mini-événement politique. Sur une scène politique chloroformée où l'opposition s'est normalisée, les anciens présidentiables pour les trois dernières échéances présidentielles se présentent en rangs dispersés. Depuis 1999, tous ces éternels candidats ont étalonné leur action en fonction d'une opposition subjective au président Bouteflika. Leurs programmes politiques ont été déterminés par les distances qu'ils mettaient vis-à-vis d'un Président auquel ils ne reconnaissaient même pas le statut de candidat. Deux élections plus tard, le suffrage universel a clos ce débat, et ces présidentiables ont compris, chacun à sa manière, qu'il ne s'agit pas d'être “adoubé” ou “désigné” pour entrer dans les habits d'un chef d'Etat. Reste que les habitudes ont la peau dure. Ces présidentiables, auxquels on reproche souvent un timing d'apparition élaboré, semblent taraudés par l'éternelle question : “Pourquoi pas moi ?” Les débâcles, les échecs électoraux et les fiascos politiques ne sont jamais, pour eux, des arguments d'une retraite de la scène publique. On donne un avis, on livre une opinion et on attend, dans l'ombre, qu'un génie sorte de la lampe pour faire cet éternel vœu de prendre le pouvoir, à défaut de le conquérir. Dans ce jeu de faux-semblant, les appétits silencieux se réveillent à chaque frémissement d'ambition personnelle. Et quand le président Bouteflika est annoncé malade, les conclaves se reforment pour aboutir, souvent, à des complots stériles et sans grande portée politique sur la vie des Algériens. Pour autant faut-il blâmer l'ambition en politique ? Là n'est pas le débat. De par leurs connaissances politiques, leur background et leur parcours au sein de l'Etat ou dans l'opposition, ces présidentiables ne sont pas arrivés à se muer en “leaders d'opinion”. Ce qu'un Algérien aurait souhaité. Leur visibilité sur le terrain est quasi nulle. Leur ancrage populaire est aléatoire. Leur souci d'image prépondérant. Et c'est lorsqu'ils auront dépassé le cadre égocentrique d'une échéance politique qu'ils auront la possibilité de se “construire” un électorat à la mesure de leurs ambitions. Car en élisant Bouteflika par deux fois, les électeurs ont demandé à la classe politique de faire la politique autrement. Un message qui n'est pas près d'être assimilé par tout le monde. M. B.