“Le Maroc, instrument de la France pour continuer de régler ses comptes avec l'Algérie ?” tel est le titre d'une récente contribution, publiée le 29 avril dernier sur le site d'Arso, une association suisse pour un référendum au Sahara occidental. L'auteur de l'analyse, Baba Sayed, le représentant du Front Polisario en France, place d'emblée la survie de la monarchie marocaine dans le cadre de “son caractère suranné et médiéval (et) les pratiques d'un autre âge”, et des relations “spécifiques” entretenues par Mohammed VI et Hassan II avec “les dirigeants (de droite comme de gauche) de la République française”. En fait, le responsable sahraoui n'a rien inventé et il en est conscient. D'autres personnes avant lui, à l'exemple de Jean-Pierre Tuquoi, journaliste au quotidien français Le Monde, et de l'écrivain Gilles Perrault (auteur de Notre ami le roi, édition Gallimard, Paris 1990), ont déjà levé le voile sur cette “amitié honteuse” entre un royaume considéré comme “l'un des plus archaïques, corrompus et liberticides de la planète” et des dirigeants de la “patrie des droits de l'homme et du citoyen”. Pour le représentant du Polisario, une telle relation “exceptionnelle et spécifique” est dictée par des intérêts “mutuellement” avantageux. Au point de voir les responsables de l'Hexagone “mobilisés pour aider les responsables marocains à affronter les manifestations régulières de colère de leur propre peuple (…), les conseiller et les soutenir, au sein des organisations internationales (y compris le Conseil de sécurité des Nations unies) dans leurs efforts tendant à “faire désespérer” le petit peuple sahraoui, mais également les “couvrir”, régulièrement, contre les critiques unanimes d'organisations internationales”, telles que Amnesty International, Human Rights Watch, la Fédération internationale des droits de l'homme ou le Parlement européen. Du Conseil de sécurité des Nations unies, de l'Afrique au Maghreb en passant par les organismes spécialisés de l'Union européenne, la France n'a ménagé ni ses efforts ni ses moyens pour soutenir les rois du Maroc et conforter leur pouvoir, note-t-il. Empruntant des passages du dernier ouvrage de l'ancien correspondant du Monde à Rabat (Majesté, je dois beaucoup à votre père. France-Maroc, une affaire de famille, édition Albin Michel, Paris 2006), Baba Sayed en arrive à se demander ce qui pourrait bien justifier cette proximité aussi paradoxale que “honteuse”, du moment que le royaume chérifien n'est pas le partenaire “stratégique” de la France, contrairement à son voisin algérien. L'auteur de Le Maroc, instrument de la France pour continuer de régler ses comptes avec l'Algérie ? parvient néanmoins à trouver la “seule” explication plausible : “une haine commune vouée à l'Algérie et une volonté tout aussi commune de tout faire pour l'empêcher de s'imposer dans son environnement comme la force régionale principale, voire la faire trébucher et la déstabiliser”. Et c'est dans le cadre de cette stratégie que Baba Sayed en arrive à attester que Paris “n'est en réalité que l'instrument commode et docile d'une République revancharde qui n'a jamais accepté, ni oublié et encore moins pardonné à l'Algérie, à son peuple et à ses dirigeants, un certain 5 Juillet 1962”. Pour preuve, précise-t-il, la France n'a cessé d'entretenir, pendant ces trois dernières décennies, “un jeu que les deux derniers rois successifs du Maroc, Hassan II et Mohamed VI se sont fait leur”, au sein du Maghreb. En attendant l'avènement, aussi bien à Paris qu'à Rabat, de “relèves politiques responsables” soucieuses quant à la recherche “de la paix et du développement”, le représentant sahraoui invite les peuples de l'Afrique du Nord, y compris les Marocains et les Sahraouis, à méditer sur la problématique de “la paix et l'amitié retrouvées”. Synthèse Hafida Ameyar