La police, qui a perquisitionné dans les trois hôtels, évoque une véritable organisation qui a permis à des centaines d'Algériens de bénéficier de prestations sociales depuis 4 ans. La fraude sociale est un jeu international en France : allocations familiales, revenu minimum (RMI), indemnités de chômage (Assedic), fausses ordonnances, trafic de carte Vitale (assurance-maladie) font l'objet d'arnaques qui coûtent cher à la collectivité. De 400 à 500 millions d'euros ont été ainsi détournés ces dernières années. De phénomène marginal, ce jeu prend des allures d'une industrie qui ne touche pas que les plus démunis. Il y a, par exemple, des cadres qui font croire via de faux bulletins de salaire, à des salaires faramineux en vue d'empocher des indemnités de chômage qui le sont autant. Il y a bien sûr les immigrés qui ne sont pas tous vulnérables. Il y a les clandestins qui peuvent trafiquer les papiers en vue de bénéficier des prestations sociales. Mais on peut trouver même de riches Britanniques possédant de somptueuses demeures sous le soleil de la Dordogne, roulant en 4X4 et qui excellent dans ces combines. Les Maghrébins n'ont donc pas le monopole. La saignée a conduit les organismes sociaux à plus de vigilance. Sauf que leur action risque de faire des dommages collatéraux touchant des catégories fragiles. C'est ce qui vient de se passer à Marseille où trois gérants d'hôtel ont été inculpés, hier, pour escroquerie en bande organisée, faux, fraude fiscale et faux en écriture. Ils sont soupçonnés d'avoir fourni de faux certificats d'hébergement qui ont permis à des travailleurs algériens de bénéficier des prestations sociales. Deux des gérants ont été écroués et l'autre placé sous contrôle judiciaire. Interpellés jeudi dernier, ils ont été placés en garde à vue à l'issue d'une opération de police menée à l'aube dans plusieurs hôtels. Les perquisitions ont permis aux enquêteurs de saisir un stock de documents vierges attestant de la réalité du trafic. La police évoque une “véritable organisation” qui a permis à des centaines d'Algériens de bénéficier des prestations sociales depuis 4 ans. Coût de ce trafic : 4,5 millions d'euros dont 92 % versés par la Caisse d'assurance-maladie au titre d'allocations complémentaires de vieillesse. S'il s'agit bien d'un trafic, ce chiffre montre qu'il y a une détresse sociale qui doit être prise en compte. Pour nombre de retraités, la pension est si faible qu'elle est insuffisante. C'est souvent ce qui les conduit à retourner au pays. Or, il existe une allocation de solidarité qui peut leur permettre de soulager leurs fins de mois difficiles. Elle n'est, cependant, versée qu'à ceux qui ont fait le choix de rester en France. D'où cette domiciliation dans les hôtels que des patrons peu scrupuleux ont transformé en rente. L'Association française Le Rouet n'a, d'ailleurs, pas manqué de s'indigner de ces soupçons de fraude sur les retraités immigrés. “Ils ont travaillé en France durant des années, ils ont cotisé. Aujourd'hui, leur retraite est si faible qu'ils ont le droit à une allocation de solidarité. Comme il y a très peu de foyers pour travailleurs immigrés à Marseille, ils sont obligés de trouver des hébergements dans ces petits hôtels”. “On ne peut pas désigner ces gens comme des fraudeurs”, s'indigne l'association. La communauté algérienne de Marseille était concernée cette semaine par une autre enquête. Il s'agit d'un dossier de fraudes financières qui a permis l'interpellation de 13 personnes. C'est le train de vie tapageur d'un imam qui a éveillé les soupçons. L'homme de religion résidant dans la petite ville ouvrière de Port-de-Bouc a été inculpé pour blanchiment en bande organisée et exercice illégal de la profession de banquier. Les enquêteurs de la brigade financière ont pu retrouver la trace d'une dizaine de millions d'euros ayant transité entre la France et l'Algérie. Y. KENZY