L'entretien avec le président égyptien, Hosni Moubarak, a eu lieu peu de temps avant l'inauguration de l'exposition commémorant le 6e centenaire du décès du célèbre penseur maghrébin et qui proposait une revue des relations politique, économique et sociale qui existèrent au XIVe siècle entre l'Europe et le monde arabo-musulman. Rien n'a filtré de ces discussions, mais il ne fait pas de doute qu'il a été également question de la conjoncture arabe, qui n'est guère réjouissante. Loin s'en faut. La situation est préoccupante, voire délétère, dans les parties où les foyers sont vifs. En Palestine, “la mère des batailles arabes”, le contexte est explosif. Israël signe et persiste dans son unilatéralisme en toute impunité et sous l'œil complaisant des Etats-Unis, pour ne pas dire plus. Et comme pour lui faciliter la tâche, les Palestiniens menacent de s'entredéchirer. Une sorte de guerre civile couve dans les territoires occupés où se regardent en chiens de faïence les forces de sécurité légales et les milices de Hamas actionnées par le gouvernement à ses couleurs. L'animosité entre le parti historique du nationalisme palestinien (le Fatah) et la formation islamiste est, de surcroît, exacerbée par l'éprouvante crise de trésorerie qui paralyse l'Autorité palestinienne, incapable depuis deux mois d'assurer les salaires de ses 160 000 fonctionnaires. Le tiers de la population active ! La Palestine est soumise à un embargo de la part d'Israël, des Etats-Unis et de l'UE. Même la Ligue arabe ne peut pas acheminer son aide financière aux Palestiniens. Les banques craignant les réactions de Washington. Hamas est soumis à de multiples pressions mais, apparemment, il ne veut toujours pas céder, arguant, à juste raison, que, jusqu'ici, seuls les Palestiniens ont fait des concessions et plus. L'autre dossier a trait à la situation qui prévaut en Irak où le nouveau Chef du gouvernement peine à former son équipe, en dépit de l'enjeu de cette phase pour le démarrage de l'Irak post-Saddam. Le pays est exsangue et rien à l'horizon ne vient faire espérer une quelconque éclaircie. La guerre intercommunautaire s'y est pratiquement installée, rendant improbable le retrait des forces d'occupation, sous le panache des Etats-Unis. La situation irakienne n'est pas sans incidences sur le reste du monde arabe. La liste exhaustive des dommages collatéraux, découlant de son invasion sur son voisinage, est loin d'être close. La Ligue arabe espère voir aboutir ses efforts en vue d'organiser une conférence interirakienne pour instaurer un dialogue national entre les différentes communautés irakiennes. À l'issue de l'audience que lui avait accordée le président de la République, le premier responsable de l'organisation panarabe devait ajouter que l'entretien a porté aussi sur le dialogue des civilisations et la coopération entre l'Europe et le monde arabe dans le domaine culturel où les incompréhensions, les amalgames, les fantasmes et les calculs politiciens ont marqué le pas, faute de volonté politique de la part notamment de l'UE de forger avec ses voisins du Sud un véritable partenariat, exempt d'arrière-pensées et délibérément ouvert sur l'avenir. Le président Bouteflika s'est rendu jeudi à Séville pour l'inauguration de l'exposition “Ibn Khaldoun, la Méditerranée au XIVe siècle : essor et déclin des empires”. Plusieurs chefs d'état des pays du pourtour méditerranéen devaient prendre part à cette manifestation, à l'invitation du roi d'Espagne Juan Carlos. D. Bouatta