Depuis quelques mois, le groupe multiplie les déconvenues. Le crash était à venir. Khalifa : la déroute. Depuis hier, la banque Khalifa appartenant au groupe du même nom est passée sous le contrôle d'un administrateur provisoire, nommé par la Banque d'Algérie. Les pouvoirs de gestion de la banque échappent ainsi aux mains des hommes de Khalifa. Dans la même journée, plusieurs avions de la compagnie aérienne, Khalifa Airways, étaient cloués au sol à l'aéroport d'Alger avant d'être autorisés à reprendre les vols en début de soirée. Deux évènements qui viennent porter l'estocade au groupe présidé par le milliardaire Rafik Moumen Khalifa, dont la crédibilité et la réputation ont été sérieusement malmenées en début la semaine dernière. En effet, le 24 février dernier, trois proches collaborateurs de l'homme d'affaires, le directeur général du catering de Khalifa Airways, le patron de Khalifa News et de Khalifa TV, ainsi que le chef du bureau d'Espagne de la compagnie aérienne ont été arrêtés à Alger en possession de 2 millions d'euros en liquide, non déclarés. Les trois hommes s'apprêtaient à embarquer à bord du jet privé de Moumen à destination de Paris. Une deuxième perquisition effectuée au domicile d'un autre collaborateur a permis la saisie d'une somme du même ordre en euro. Selon des indiscrétions rapportées par des journaux, les transferts illicites de devises dans des avions seraient une habitude. L'information révélée par El Watan et Le Monde, a été assortie par ce dernier d'un mandat d'arrêt international, lancé par la justice algérienne à l'encontre du président du groupe Moumen Khalifa. Certes, ce dernier dément l'information et attaque le quotidien français en justice pour diffamation, mais le coup étant parti, il finit par déstabiliser le groupe. Trois coups successifs qui viennent donc parachever une série de déboires qui ont ponctué la vie du groupe depuis l'automne 2002. Après une période d'euphorie marquée par le lancement en grande pompe de Khalifa TV, le groupe essuie une violente tempête médiatique mettant en doute l'origine de la fortune de Moumen Khalifa qui, étrangement, adopte un profil bas aux multiple accusations lancées par la presse étrangère. La bourrasque médiatique débouche sur une suspension momentanée de KTV. Le groupe espère pouvoir souffler avec l'autorisation accordée à la chaîne par le CSA, mais le répit n'est que de courte durée. Le 27 novembre, les autorités algériennes décident de bloquer tout transfert de fonds en devises de Khalifa Bank. La décision survient après un contrôle de la Banque d'Algérie et du ministère des Finances. Les vérifications faites par les experts algériens révèlent des infractions au régime du contrôle des changes. Le groupe est accusé d'effectuer des transferts de liquidités vers l'étranger — au moins cinquante millions de dollars — non adossés à des opérations financières. Le gel des avoirs plombe sérieusement la trésorerie du groupe qui doit faire face à d'importants engagements vis-à-vis de ses différents partenaires étrangers. On évoque, entre autres, la position délicate des dizaines de pilotes envoyés par Khalifa en formation en Ecosse et en Australie. La formation de ces élèves serait sérieusement hypothéquée du fait de l'incapacité de l'entreprise d'honorer la contrepartie financière des études. Last but not least, les Turcs décident de rapatrier leurs avions, cédés à Khalifa grâce au leasing. Les responsables du groupe confirment l'information, mais préfèrent étouffer le camouflet dans une prétendue “fin de contrat”. Bref, on est sacrement bien loin du titre de ce livre hagiographique consacré à Rafik Khalifa : histoire d'un envol. F. A.