Pour la ministre de la Culture, cette manifestation porteuse d'une dynamique culturelle est un “défi collectif” pour l'ensemble des acteurs concernés. C'est par un portrait des plus élogieux de Khalida Toumi qu'a débuté, samedi dernier, le Forum de l'ENTV consacré à la culture. Avant de répondre aux questions des journalistes, la ministre, nommée à ce poste en 2003, a dressé le bilan des activités de son département ; bilan dans lequel la mise en place d'une assise juridique aux différents secteurs de son département se taille la part du lion. La ministre a donc annoncé la promulgation de décrets d'application concernant la protection des droits d'auteur, des lois relatives à la protection du patrimoine culturel national, d'une autre loi régissant l'organisation de spectacles et l'institutionnalisation de 29 festivals. Quant à la nouvelle loi du livre et de la lecture publique, elle ne verra le jour, à en croire Khalida Toumi, qu'à la fin de cette année. À ce sujet, la ministre a fait un constat qui illustre l'effort qui reste à fournir pour que l'Algérie se hisse au niveau des pays en voie de développement : “L'Unesco donne une moyenne, pour les pays en développement, de deux livres pour un citoyen. Chez nous ce ratio est inversé. Il nous faut donc multiplier par 4 le nombre de livres actuellement disponibles.” Et afin de parvenir à cette moyenne, la ministre de la Culture a évoqué le projet intitulé “Une bibliothèque par commune” mené conjointement avec le ministère de l'Intérieur et des Collectivités locales, qui prévoit la création de “10 annexes de la Bibliothèque nationale attendues avant 2009 et de 339 bibliothèques communales qui sont en cours de réalisation”. En attendant de voir les 1 541 communes du pays dotées d'une bibliothèque, l'année prochaine sera celle qui verra Alger gratifiée du titre de capitale de la culture arabe. Une bien lourde tâche qui fera dire à la ministre de la Culture que “c'est un défi collectif qu'il nous faudra relever. Nous voulons montrer au monde, surtout à ceux qui misaient sur la mort de l'Algérie, que nous ne sommes pas rancuniers. Car nous sommes sortis vainqueurs”. Entendre par là la décennie marquée par le terrorisme islamiste et durant laquelle “personne ne voulait être ministre (…) et personne ne parlait culture”, selon Khalida Toumi. Et comme il ne peut être question de création artistique sans argent, selon la propre formule de l'ancienne députée du RCD, la ministre a indiqué que cette manifestation “bénéficiera d'un budget qui sera de 20 à 30 fois supérieur à celui alloué à l'année de l'Algérie en France”. Mais cet argent pourra-t-il effacer l'image d'Alger, comme le lui a rappelé une journaliste, telle que dépeinte par Yazid Zerhouni, ministre de l'Intérieur, qui avait déclaré qu'“Alger est une ville sale où règne l'insécurité” ? Dans ces propos, Khalida Toumi n'a voulu voir que de la “pédagogie (…) Il a dit cela pour pousser tout le monde afin qu'Alger soit prête à accueillir une telle manifestation. Je ne doute pas un seul instant de la confiance qu'il a dans son pays”. Lors de son passage à l'ENTV, la ministre de la Culture a également abordé le sujet de la sauvegarde du patrimoine culturel national, objet de bien de pillages et de controverses. Cette opération, dira-t-elle, ne peut être mené à bien sans l'établissement de l'inventaire général, des biens culturels, inexistants il y a si peu, mais qui serait en cours d'achèvement. “Sans cet inventaire, dont le coût est très élevé, on ne peut pas savoir ce qui a été pillé”. Et pour mieux expliquer cette situation, elle a cité l'exemple d'une tête de statue volée en Algérie et retrouvée aux USA, mais que “l'on arrive pas à récupérer faute de preuve”, a avoué la ministre dont le département, dans de pareilles affaires, ne peut avoir recours qu'à l'arrangement à l'amiable. Elle a, par ailleurs, dénoncé la mauvaise qualité des travaux de restauration dont auraient souffert certains vestiges architecturaux tels que La Casbah d'Alger à laquelle on aurait prescrit, selon ses dires, des traitements relevant davantage du charlatanisme. Elle n'hésitera pas, à ce sujet, à parler de “s'hour et b'khour” jusque-là appliquée à la vieille ville. SAMIR BENMALEK