Le ministre des Affaires religieuses vient de signer une circulaire portant création de 48 commissions de wilaya de lecture et d'homologation du Livre Saint, visant à intercepter des exemplaires en circulation, qui comportent des altérations graves et malveillantes de versets, et qui sont le fait de salafistes. La déformation de l'islam en vue de son instrumentalisation à des fins politiques n'a plus de limites. Les tenants du radicalisme religieux, les salafistes, ne se contentent plus d'interprétations erronées des préceptes de la foi islamique, à travers des fatwas et des publications subversives. Leur stratégie visant à propager leurs idées obscurantistes est montée d'un cran, à travers, l'altération du contenu du Livre Saint. Selon une source proche du ministère des Affaires religieuses et des Waqfs, des exemplaires erronés du Coran ont été introduits en Algérie en vue de leur commercialisation. Ces livres comportent bien tous les versets du Coran. Mais certains sont loin d'être conformes à la version originelle. “Des mots ont été rajoutés et d'autres ôtés”, révèle notre source. Selon elle, les déformations sont si subtiles que le lecteur ordinaire peut ne pas s'en rendre compte. Alerté par cette grave et scandaleuse arnaque, le département de Bouabdelallah Ghoulamallah vient de prendre des mesures. Il y a moins de 10 jours, le ministre signait une circulaire portant création de commissions de wilaya de révision du Livre Saint avant sa mise en circulation. Si les avaries correspondent quelquefois à des erreurs d'impression, souvent elles sont le fait d'esprits malveillants. Conscient de cet état de fait, M. Ghoulamallah affiche sa détermination à combattre les apostats qui entreprennent, par le biais de la falsification du Coran “à semer le trouble parmi les fidèles qui viendraient à douter de la bonne foi des imams et à remettre en cause les valeurs sacrées de la religion”. Une commission nationale de lecture et d'homologation installée au niveau de l'administration centrale doit coordonner les missions des instances de wilaya. Celles-ci sont formées par des inspecteurs, des enseignants universitaires, des imams… “Elles comporteront des hommes intègres de divers horizons qui ont une bonne connaissance de la religion, pas forcément des fonctionnaires du ministère des Affaires religieuses”, confie notre source. Les exemplaires du Coran dont les commissions auront à vérifier minutieusement le contenu ne concernent pas seulement les copies en vente en librairie. Les étals des bouquinistes seront également passés au crible. Par ailleurs, les livres disponibles dans les mosquées, les instituts de formation des imams et des cadres des affaires religieuses, les centres culturels islamiques ainsi que les facultés de la charia, seront soumis au contrôle. Même les répliques provenant de donations et celles imprimées par la tutelle passeront entre les mains des “grands lecteurs” de la commission nationale. “Il faut s'assurer de l'absence de fautes, de la pagination, de la présence de toutes les sourate et de leur classement exact”, enjoint le ministre dans sa circulaire. De toute évidence, ce travail de fourmi est colossal, compte tenu du nombre considérable de livres en circulation. Les exemplaires, ayant obtenu l'aval des commissions, seront gratifiés d'un cachet portant la mention “Autorisé à la circulation”. Sur cette estampille visible sur la première page, doivent figurer en outre les identités du département des Affaires religieuses et de la commission ministérielle ou des commissions de wilaya. Les missions locales doivent fournir des rapports réguliers à l'administration centrale sur l'avancement de leurs travaux. S'il est avéré que le ministère est la source des exemplaires non conformes, les livres lui seront restitués. Les autres dont la provenance est inconnue seront détruits. Les saisies et les destructions seront consignées sur des procès-verbaux qui porteront la double signature du président de la commission locale et du directeur des affaires religieuses de wilaya. Dans les mosquées, la décision a été prise d'interdire aux imams d'utiliser ou de mettre à la disposition des fidèles des copies du Livre Saint, sans estampille. À son tour, il est un devoir de transmettre des rapports sur la présence de livres suspects dans son office. Enfin, un appel est adressé à tous les citoyens afin de faire contrôler les livres dont ils sont acquéreurs par l'imam de leur quartier. “La présence d'estampille facilite surtout le travail des forces de l'ordre qui en son absence sont en droit de saisir les reproductions”, note notre source. Samia Lokmane