La traduction exige de nous beaucoup de délicatesse. Au demeurant ne dit-on pas : traduire, c'est trahir ! Toute langue a ses spécificités, ses subtilités, ses idiomes... Face à l'écueil, le traducteur éprouve des difficultés à traduire la lettre et l'esprit du texte. Dans ce cas, et dans ce cas seulement, son honnêteté intellectuelle est sans reproche ; mais en l'absence d'écueil, si la traduction est altérée, sa malveillance est prouvée. Malheureusement, le texte coranique a connu des vicissitudes aussi bien dans un cas comme dans l'autre : la traduction honnête, mais approximative et la malveillance de certains orientalistes. Commençons par la traduction honnête et approximative. Le saint Coran contient beaucoup d'erreurs de traduction : néanmoins contentons-nous d'un seul exemple, mais significatif : « alaq » : la traduction de ce mot est altérée ; il est traduit par la non moins célèbre expression « caillot de sang ». Nous disons la non moins célèbre, car elle est ancrée dans l'esprit de la majorité des gens, y compris des initiés : imams, exégètes et anciens ministres des Affaires religieuses. En vérité, la traduction la plus appropriée en est certainement « embryon nidé ». Le mot embryon signifie « vertébré aux premiers stades de son développement, qui suivent la fécondation ». (Pour l'espèce humaine, on parle d'embryon pour les trois premier mois, puis de fœtus). (1) Le sens : « Vertébré aux premiers stades de son développement », le sens donc du mot embryon rend mieux l'esprit des versets coraniques relatifs à la fécondation où Dieu n'a pas cessé de répéter qu'il nous a créés stade après stade dans différentes sourates : « C'est Nous qui vous avons créés de terre, puis d'une goutte de sperme, puis d'une adhérence, puis d'un embryon normalement formé aussi bien qu'informe pour vous montrer Nôtre Omnipotence et Nous déposerons dans les matrices ce que Nous voulons jusqu'à un terme fixé ». Sourate 22, verset 5. Et « Dieu nous forme à l'intérieur du corps de vos mères, création après création dans trois ténèbres », sourate 39 verset 6. Et « Alors qu'il vous a créés par phases successives », sourate 71 verset 14. (2) Ou encore, « Nous avons certes créé l'homme d'un extrait d'argile ; puis Nous en fîmes une goutte de sperme dans un reposoir solide. Ensuite, Nous avons fait du sperme une adhérence ; et de l'adhérence Nous avons créé un embryon : puis, de cet embryon Nous avons créé des os et Nous avons revêtu les os de chair, ensuite, Nous l'avons transformé en une toute autre création. Gloire à Allah le meilleur des Créateurs ! », sourate 23, versets 12-13-14 ; cf. aussi sourate 40, verset 67 et sourate 75, verset 38 et sourate 96, verset 1 et 2. L'idée de durée (on parle d'embryon pour les trois premiers mois) sous-tend le développement ou le passage d'un stade à un autre, et force est de constater que le mot « alaq » traduit indûment par l'expression « caillot de sang » est impropre et nous éloigne de l'esprit de la révélation divine. A présent, abordons la traduction malveillante de certains orientaliste du saint Coran : citons à titre d'exemple les versets 32 et 33 ; sourate 42 « Et parmi ses preuves, sont les vaisseaux à travers la mer, semblables à des montagnes. S'Il veut, Il calme le vent, et les voilà qui restent immobiles à sa surface. Ce sont certainement là des preuves pour tout homme endurant et reconnaissant. » Tel que nous l'avons vu précédemment pour le mot « alaq » traduit indûment beaucoup plus par ignorance que par malveillance, le mot « el jawari » est lui aussi traduit indûment par le terme « vaisseaux », mais cette fois avec beaucoup de malveillance, à tel enseigne que le verset du Coran frise le ridicule, mais n'était-ce pas le but recherché du traducteur orientaliste ?! Méditons ce verset : il contient une preuve pour « l'homme endurant et reconnaissant » ; c'est précisément parce qu'il contient une preuve que le traducteur orientaliste le choisit afin d'altérer son sens. Mais en quoi consiste la preuve ? Elle consiste, si Dieu calme le vent, en l'immobilité d' « el jawari », à travers la mer, c'est-à-dire des « vaisseaux » ainsi que c'est traduit dans le Coran. Rien que ça ! Or, une fois le vent calmé, n'y a-t-il pas de moyens pour mouvoir ce que, par Sa Volonté, Dieu veut rendre immobile. Oui ! Avant le XIXe siècle, la rame par la force des bras de l'homme y suffisait largement ; après le XIXe siècle, le moteur à vapeur y contribuait mieux encore, nonobstant le vent tombé. Auquel cas, où est la peuve ? Et l'Omnipotence du Tout-Puissant ? Puisque malgré Sa Volonté de rendre immobiles les vaisseaux en mer en calmant le vent, l'homme par des moyens dérisoires parvient à contrarier sa volonté, échouer son dessein. Est-ce là la preuve ? ! Grand Dieu non ! C'en est une pourtant ! Immense ! Seulement si la malveillance du traducteur orientaliste n' était pas de mise « el jawari » ne sont pas des « vaisseaux », mais des lames de fond : foison d'eaux profondes (3) Ainsi traduit, el jawari donne un tout autre sens au verset où apparaissent immenses la Volonté, la Preuve et l'Omnipotence de Dieu. De fait, si Le Tout-Puissant décide de calmer le vent, les lames de fond « el jawari » s'immobilisent à la surface de la mer et rien ni personne ne pourraient contrarier le cours des choses. Il suffit d'un mot à la place d'un autre, d'une nuance ou simplement d'une virgule pour que le sens change du tac au tac. Ici, avec le sens « vaisseaux », nous avons le ridicule et la vulnérabilité de la preuve ; avec lame de fond, Son immensité et Sa puissance. Par conséquent, la traduction est loin d'être une simple affaire, elle repose sur l'honnêteté intellectuelle et la parfaite connaissance de la langue. Si tel n'est pas le cas, le tort est vite fait, et quel tort ! 1- Voir le dictionnaire Larousse 2- Ce sont ces étapes successives que les grands savants n'ont pas su découvrir avant les deux derniers siècles. Il faut attendre les expériences de Von Baer (XIXe siècle). 3- El Moundjid El Abjadi