Bon nombre de praticiens s'interrogent sur l'utilité de nouvelles lois relatives aux maladies à déclaration obligatoire. Faut-il mettre la charrue avant les bœufs ? C'est la question récurrente qui se pose avec acuité, aujourd'hui, dans le milieu médical, sur l'applicabilité des textes de lois. Plus concrètement, la priorité revient-elle actuellement à la révision d'un texte réglementaire ou au respect de son application sur le terrain ? Bon nombre de médecins s'interrogent, en effet, sur l'utilité de nouvelles lois relatives aux Semep et même aux maladies à déclaration obligatoire (MDO), alors que l'urgence se situe au niveau de l'application et du suivi de celles qui existent déjà. D'aucuns en arrivent d'ailleurs à déplorer “l'absence de capitalisation et d'évaluation du travail réalisé” pendant les deux ou trois dernières décennies. Qu'en est-il vraiment de l'information sur les malades et les soins qui leur sont prodigués ? Une étude, réalisée en avril 2004 par des étudiants de la Faculté de médecine d'Alger, aborde la problématique du profil des consultants du service des urgences médicales du CHU de Béni-Messous. L'enquête a concerné une population de 820 personnes qui se sont présentées aux urgences de cet hôpital et repose sur le traitement manuel de données, contenues dans les fiches de consultation qui ont été remplies par les médecins. Elle s'appuie, notamment sur les résultats d'un questionnaire comprenant des informations sur l'état civil du consultant, ses antécédents médico-chirurgicaux, son mode d'entrée, les résultats de l'examen clinique et des examens, le diagnostic et la conduite à tenir. Comme auront à le faire remarquer les étudiants en médecine, les fiches de consultation “manquent de précision et ne contiennent pas toutes les variables nécessaires” pour l'enquête. L'enquête, certes limitée dans le temps (du 1er au 7 avril 2004), met à nu le comportement du thérapeute face à la fiche de consultation, souvent incomplète, ce qui pourrait être, dans les cas de maladies chroniques, fatal pour le patient. L'étude de la qualité de l'information sur la variable sexe montre que l'information se rapportant au sexe du malade n'est pas précisée dans 3,15 % des cas. Il est également constaté l'absence totale d'information sur le mode d'entrée-évacuation d'un service vers le service des urgences médicales du CHU Béni-Messous : dans 100 % des cas (25 malades), l'information n'est pas indiquée. Par ailleurs, dans 74, 76% des cas (711 consultants), le diagnostic des patients n'est pas précisé. L'information fait aussi défaut sur “les examens complémentaires” demandés aux diabétiques : elle n'est pas précisée pour 4 malades (13,33 %) souffrant de diabète. Dans 71,15% des cas d'hypertension, les complications liées à l'hypertension ne sont pas signalées. Dans l'examen des fiches de consultation des patients au niveau du service des urgences, les étudiants font part de l'absence du motif de consultation sur plus de 22% des fiches (174 malades). Ils indiquent que sur 6% des fiches de consultation (40 malades), “l'écriture est illisible”, dans plus de 4% des cas (33 malades), “le symptôme est mal défini” et dans 68,57 % des cas, “le motif de consultation est correctement précisé”. Par ailleurs, aucun signalement n'est fait sur les “antécédents familiaux” chez l'ensemble des consultants diabétiques (au nombre de 27), ni sur l'évolution de ces derniers (décès, amélioration ou aggravation). Toujours pour les malades diabétiques, il est noté que 43% d'entre eux, soit près de la moitié des cas, la qualité de l'information relative au type de traitement du malade diabétique n'est pas précisée, et que pour 8 personnes diabétiques (26,66%), le lieu de résidence n'est pas cité. Le même flou entoure le mode de sortie des consultants au niveau du service des urgences médicales, resté sans précision. Sur le chapitre de l'information sur le type de traitement des hypertendus, présentés aux urgences, il est dit que dans 40% des cas, la qualité d'information n'est pas précisée. On apprend toutefois que 79,55% des consultants hypertendus “n'ont pas été soumis à des examens complémentaires” pendant le mois d'avril 2004, et que dans 71,15% des cas d'hypertension, “les complications liées à l'hypertension n'ont pas été signalées”. Dans une étude plus récente (période entre janvier et août 2005), consacrée cette fois à la “morbidité hospitalière” au niveau du service de réanimation du CHU de Bab El-Oued, des étudiants en médecine à Alger ont réalisé une étude épidémiologique sur le terrain, qui a concerné 100 malades hospitalisés. Ils préviennent d'emblée que des “difficultés”, liées à l'imperfection des informations recueillies, les ont empêchés à mener à bien leur travail, considérant ainsi celui-ci comme “une pré-enquête”. Dans leur introduction, les rédacteurs notent : “Le système d'information sanitaire est un ensemble de procédures permettant d'observer de façon régulière et systématique les événements de santé dans une population, afin de détecter les cas inhabituels, d'aider à la planification, et à l'évaluation des besoins de santé, d'aider à la connaissance des profils épidémiologiques et à la recherche.” Ils révèlent aussi que grâce au système d'information, les données “vont être utilisées pour la présentation et le contrôle des maladies, ainsi que pour l'information sanitaire, pour permettre aux différents acteurs du système de santé d'agir de manière plus efficace pour une meilleure prise en charge des besoins en santé”. Ils révèlent dans leur enquête que dans 6% des cas, l'information concernant les antécédents médicaux n'a pas été précisée sur les dossiers des malades hospitalisés. Le même constat est établi pour 11% des cas, où l'information sur les “antécédents chirurgicaux” fait défaut. Concernant les manœuvres invasives, ils affirment que dans 5% des cas, l'information manque sur les dossiers des malades hospitalisés. Que dire alors de l'avenir du projet informatique Intranet si les informations données venaient à être incomplètes ou incorrectes ? H. Ameyar