Le Dr Bekkat estime qu'il n'y a pas mieux qu'un collège de médecins pour juger les médecins qui se rendent coupables de fautes ou d'erreurs médicales. Invité hier matin du forum d'El Moudjahid, le président de l'Ordre des médecins, le Dr Bekkat, a brassé large dans les dysfonctionnements de la pratique médicale en Algérie, sans toutefois diagnostiquer les véritables causes du mal. Tout en donnant un rôle important à l'organisme qu'il préside dans le respect de la déontologie et de l'éthique auxquelles sont strictement soumis — dans l'absolu du moins — les médecins, le Dr Bekkat a bien entendu défendu les intérêts de la corporation. Il n'a pas manqué d'ailleurs de reprocher aux journalistes de se précipiter à conclure à la responsabilité d'un praticien lorsqu'un incident survient dans la prise en charge d'un patient. “Le médecin doit toujours bénéficier de la présomption d'innocence”, a-t-il conseillé afin de ne pas ruiner “injustement” la carrière du mis en cause. Il a estimé que ce corps de métier ne dispose pas toujours de moyens. Ce qui semble justifier, a priori au regard du conférencier, les fautes médicales, qu'il distingue de l'erreur, laquelle découle inexorablement de l'incompétence de son auteur. Selon le Dr Bekkat, “le citoyen n'a pas la possibilité de prouver la faute médicale”, et les magistrats ne sont pas assez outillés pour juger de tels cas. “Nous considérons qu'il n'y a pas mieux q'un collège de médecins pour juger des médecins”, a-t-il conclu. Il n'a pas nié, dans la foulée, qu'il existe de sérieux problèmes de formation et surtout une pléthore de diplômés en médecine générale. Selon lui, plus de 800 généralistes sont au chômage, rien qu'au niveau de la capitale. “Il faudrait penser à recycler ces médecins dans des spécialités sous-représentées”, a-t-il recommandé. Il a implicitement accusé les autorités nationales de fermer les yeux sur la situation de médecins tunisiens, qui exercent au noir dans les zones frontalières, et d'autres praticiens étrangers qui opèrent dans des cliniques privées. Il a, par contre, jugé intolérable que les praticiens algériens, qui travaillent dans des hôpitaux français, soient sous-considérés, malgré leur compétence avérée. “Nous avons introduit une requête pour qu'ils soient inscrits au conseil de l'Ordre français”, a-t-il indiqué. Sur un autre registre, il a noté que les lois sanitaires, qui datent de 1985, doivent être impérativement révisées. “Changer ces lois nous permettra d'apporter des amendements au code de déontologie, qui n'est pas dépassé, mais a besoin d'être amélioré pour être mieux appliqué sur le terrain”. De son avis, il est judicieux d'abroger le décret exécutif qui a institué, en 1998, l'activité complémentaire (des médecins, exerçant dans les structures sanitaires publiques, ont le droit de pratiquer dans des établissements privés deux après-midi par semaine). “C'est une erreur. C'est un système qui ne peut réussir. Il faut savoir choisir : exercer dans le secteur public ou privé”. S. H.